Traductions françaises des résumés de la CIPR
Publications 147 - 159
Publication 147 de la CIPR: Usage des quantités dosimétriques en radioprotection
Résumé
Les principales grandeurs dosimétriques utilisées en radioprotection sont la dose absorbée, la dose équivalente et la dose efficace. Le concept de dose efficace a été développé par la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR) en tant que grandeur dosimétrique ajustée au risque pour la protection des effets stochastiques, principalement le cancer, permettant de comparer les doses estimées avec les limites de doses, les contraintes de dose et les niveaux de référence exprimés dans la même unité. Son utilisation permet de considérer toutes les expositions aux rayonnements ionisants provenant de sources externes et internes et de les sommer, en se basant sur les hypothèses d'une relation dose-réponse linéaire sans seuil, d'équivalence entre les expositions aiguës et chroniques à faibles doses ou faibles débits de dose, et d'équivalence entre les expositions externes et internes. La Publication 103 de la CIPR fournit une explication détaillée de l’objectif et de l'utilisation de la dose efficace ainsi que de la dose équivalente pour les organes et tissus individuels. La présente publication apporte des recommandations supplémentaires sur le contrôle des risques radiologiques à partir de ces grandeurs dosimétriques, et traite de leurs applications dans les domaines professionnel, public et médical. Il est établi que les estimations les plus précises du risque pour l’individu sont obtenues en utilisant les doses aux organes/tissus et des modèles dose/risque spécifiques. Bien que les doses reçues à faibles niveaux d'exposition puissent être mesurées ou évaluées avec une bonne précision, les risques associés deviennent progressivement plus incertains à mesure que les doses diminuent. Malgré les incertitudes liées à la représentation du risque à faibles doses ou à faibles débits de dose, il est convenu que la dose efficace puisse être considérée comme un indicateur approximatif du risque réel, tout en reconnaissant que le risque de développer un cancer au cours de sa vie varie en fonction de l'âge au moment de l'exposition, du sexe et du groupe de population. Une autre conclusion est que la dose équivalente n'est pas nécessaire en tant que grandeur de protection. Il sera plus approprié de fixer les limites pour minimiser l’apparition de réactions tissulaires de la peau, des mains et des pieds, et du cristallin en termes de dose absorbée plutôt qu'en termes de dose équivalente.
Points principaux
- L’objectif de cette publication est de consolider et développer les explications fournies dans la Publication 103 (ICRP, 2007a), mais aussi de clarifier l'utilisation des grandeurs dosimétriques en lien avec les risques pour la santé, en tirant des conclusions qui vont au-delà des recommandations disponibles dans la Publication 103.
- La dose efficace et la dose efficace collective sont des outils précieux pour l'optimisation de la protection contre les effets stochastiques, principalement le cancer, en cas d'exposition professionnelle et de la population.
- La dose efficace est utilisée en médecine pour comparer les doses provenant de différentes procédures médicales, éclairer les décisions relatives à la justification et établir des limites pour les soignants et les volontaires dans la recherche médicale. Lorsque des doses issues de la même technique sont comparées, il est préférable d’utiliser des grandeurs mesurables.
- La dose efficace sera généralement utilisée pour des doses inférieures à 100 mSv, mais son utilisation pour des doses aiguës allant jusqu'à environ 1 Sv est possible, en tenant compte toutefois de la possibilité d'apparition de réactions tissulaires, en particulier en cas de distribution non uniforme de la dose.
- Malgré les incertitudes liées à la représentation du risque à faibles doses ou à faibles débits de dose, la dose efficace peut être considérée comme un indicateur approximatif du risque réel, tout en reconnaissant que le risque de développer un cancer au cours de la vie varie en fonction de l'âge au moment de l'exposition, du sexe et du groupe de population. Il convient de souligner qu’une telle utilisation de la dose efficace ne remplace pas une analyse spécifique des risques pour chaque type de cancer en utilisant les doses aux organes/tissus.
- L'utilisation de la dose efficace collective pour prédire des effets potentiels/possibles sur la santé doit être abordée avec prudence, replacée dans son contexte et évaluée en relation avec les taux de base de morbidité.
- La dose absorbée est la grandeur la plus appropriée pour fixer les limites des doses aux organes/tissus afin de prévenir l’apparition de réactions tissulaires (effets déterministes). La Commission envisage de remplacer l'utilisation de la dose équivalente par l'établissement de limites sur les doses reçues par les organes/tissus, dans le cadre de la publication de ses nouvelles recommandations générales.
Synthèse
- Les grandeurs dosimétriques utilisées en radioprotection sont la dose absorbée [avec le gray (Gy)], la dose équivalente et la dose efficace [toutes deux exprimées en sievert (Sv)] ; l'unité de base est le J kg⁻¹ dans chaque cas. La dose absorbée est calculée à des fins de protection comme une moyenne sur les organes et les tissus, et constitue la principale grandeur scientifique à partir de laquelle la dose efficace est calculée. La dose absorbée est la grandeur la plus appropriée pour fixer les limites des doses aux organes/tissus afin de prévenir l’apparition de réactions tissulaires (effets déterministes). La dose équivalente est une grandeur intermédiaire dans le calcul de la dose efficace, et les facteurs de pondération du rayonnement (wR) appliqués aux doses absorbées et utilisés dans le calcul de la dose équivalente se rapportent à des effets stochastiques à de faibles niveaux d'exposition plutôt qu'à des réactions tissulaires. La Commission considère que l'utilisation de la dose équivalente pour fixer des limites de doses aux organes/tissus afin de prévenir l’apparition de réactions tissulaires devrait être supprimée, mais que les limites actuelles peuvent continuer à être appliquées jusqu'à ce que de nouvelles recommandations générales soient émises. La pondération des différents rayonnements vis à vis des réactions tissulaires devra faire l'objet d'un examen plus approfondi.
- La dose efficace est calculée comme la moyenne pondérée des doses équivalentes aux organes/tissus, en additionnant les doses équivalentes multipliées par les facteurs de pondération des tissus (wT), qui fournissent une représentation simplifiée des contributions au détriment stochastique total dû au cancer et aux effets héréditaires. Les coefficients de risque nominaux ajustés en fonction du détriment (Sv⁻¹) sont calculés comme des moyennes des valeurs spécifiques au sexe, à l’âge et à la population, afin de fournir des coefficients applicables au niveau international pour l’ensemble des travailleurs (âgés de 18 à 64 ans au moment de l’exposition) et pour l’ensemble de la population (âgée de 0 à 84 ans au moment de l’exposition). La dose efficace est reconnue au niveau international comme la grandeur de référence en radioprotection, fournissant une mesure ajustée au risque de la dose au corps entier provenant de sources externes et internes en relation avec les risques de cancer et d'effets héréditaires. Elle s'est révélée être une grandeur de référence précieuse et robuste pour l'optimisation de la protection des travailleurs et du public, la définition de critères de contrôle (contraintes de dose, niveaux de référence et limites) et l’assurance du respect des exigences. Son utilisation repose sur l’hypothèse d’une relation linéaire sans seuil entre la dose et le risque à faibles doses ou faibles débits de dose, sur l’équivalence des effets des expositions aiguës et chroniques à faible niveau d’exposition, ainsi que sur l’équivalence des effets des expositions internes et externes. Bien que la dose efficace soit le plus souvent utilisée pour des doses inférieures à 100 mSv, son utilisation dans des situations d’exposition d’urgence à des doses aiguës allant jusqu’à environ 1 Sv est possible. Cependant, il convient de noter qu’en plus du risque accru d’effets stochastiques à des doses plus élevées, la possibilité d’apparition de réactions tissulaires doit également être prise en compte à ces doses, en particulier en cas de distribution non uniforme de la dose absorbée provenant de sources externes, ou de radionucléides concentrés dans des tissus ou organes spécifiques.
- La dose efficace est calculée pour des individus de référence d’âges spécifiques, moyennés selon le sexe. La définition de la dose efficace dans la Publication 103 (ICRP, 2007a) inclut la spécification de modèles anatomiques de référence pour l’homme et la femme, utilisés dans les calculs de transport des rayonnements. Bien que les expositions puissent concerner des individus ou des groupes de population, la dose efficace est calculée pour des individus de référence exposés d’une manière définie. La Commission fournit des coefficients de dose efficace pour les situations d'exposition externe et interne des travailleurs et du public, ainsi que pour l'administration de radiopharmaceutiques aux patients, en tant que coefficients de référence pour les évaluations prospectives et rétrospectives des doses. Ces coefficients de dose de référence sont fournis pour quelques situations types d'exposition, et diverses formes chimiques et physiques des radionucléides ingérés et inhalés. Des informations spécifiques à une situation d’exposition doivent être utilisées si elles sont disponibles et si le niveau d'exposition justifie une estimation plus précise de la dose.
- Lors de l’évaluation des expositions annuelles, la dose efficace est calculée comme la somme de la dose externe reçue au cours de l’année et de la dose engagée provenant des expositions internes pendant l’année, la dose engagée étant intégrée sur une période de 50 ans pour les adultes et jusqu’à 70 ans pour les enfants. Cette méthode introduit un élément de prudence pour les radionucléides à longue période biologique mais, pour de nombreux radionucléides, la majeure partie voire la totalité de la dose est délivrée au cours de la première année suivant l’ingestion. Bien que des coefficients de dose efficace soient fournis pour plusieurs groupes d'âge pédiatriques, il est généralement suffisant, dans les évaluations de dose pour le public, de considérer les groupes d'âge de 1 an et 10 ans, ainsi que les adultes. Des coefficients de dose efficace pour le fœtus après ingestion de radionucléides sont fournis pour comparaison avec les doses des autres groupes d'âge, montrant que la détermination des doses fœtales n’est nécessaire que pour quelques radionucléides.
- Bien que les différences de risques par unité de dose (en Gy) soient reconnues en fonction de l'âge, du sexe et de la population, l’utilisation de contraintes de dose, de niveaux de référence et de limites, exprimés en dose efficace et appliqués à tous les travailleurs et à tous les membres du public, avec l’optimisation, offre un système de protection pragmatique, équitable et applicable qui ne fait pas de distinction au niveau individuel. Il convient de faire une distinction entre l’utilisation des informations scientifiques pour construire un système de protection fonctionnel et acceptable et la production des meilleures estimations scientifiques de la dose et du risque pour des individus et des groupes de population spécifiques.
- Dans les applications médicales, les estimations de la dose efficace peuvent être utilisées pour comparer les doses provenant de différentes méthodes d'imagerie diagnostique et interventionnelle (par exemple, la tomodensitométrie et la médecine nucléaire) et de techniques d'exposition offrant différentes répartitions spatiales du rayonnement dans le tissu. Dans ce contexte, la dose efficace est utilisée pour fournir un indicateur générique permettant de classer les différents types de procédures médicales en grandes catégories de risques, dans le but de communiquer les risques aux cliniciens et aux patients. La dose efficace est également utilisée pour éclairer les décisions concernant la justification des procédures diagnostiques et interventionnelles sur les patients, les exigences de planification dans les études de recherche, ainsi que l’évaluation des expositions non intentionnelles. Dans chacun de ces cas, la dose efficace fournit une mesure approximative du détriment potentiel. Ainsi, la dose efficace peut être utilisée de manière prospective comme indicateur du détriment radiologique dans les décisions de justification et lors de la planification d’études de recherche médicale impliquant une exposition aux radiations, ou de manière rétrospective dans les évaluations d’expositions accidentelles. Toutefois, les quantités mesurables sont utilisées directement pour comparer les doses reçues lors de procédures particulières dans différents centres de santé, y compris la définition des niveaux de référence diagnostiques et dans les dossiers des patients.
- Compte tenu des incertitudes liées à la représentation du risque à faibles doses ou à faibles débits de dose, la dose efficace peut être considérée comme un indicateur approximatif du risque réel, tout en reconnaissant que le risque de développer un cancer au cours de la vie varie en fonction de l'âge au moment de l'exposition, du sexe et du groupe de population. Pour les procédures médicales ou autres situations dans lesquelles un seul organe reçoit la majorité de la dose, comme le sein en mammographie ou la thyroïde lors de l'administration thérapeutique d’iode radioactif, les doses moyennes absorbées par les tissus d’intérêt doivent être utilisées plutôt que la dose efficace. Lors de l'examen des doses reçues par les patients atteints de maladies à pronostic défavorable, l'espérance de vie sera un facteur à prendre en compte dans l'évaluation des risques liés aux rayonnements ionisants. L’utilisation de la dose efficace comme indicateur approximatif du risque ne remplace pas une analyse des risques utilisant les meilleures estimations des doses aux organes/tissus, les informations appropriées sur l’efficacité relative des différents types de radiations, ainsi que les facteurs de risque spécifiques à l’âge, au sexe et à la population, tout en tenant compte des incertitudes.
- La dose efficace collective est un outil précieux dans l'optimisation de la protection des travailleurs et du public. Elle peut être utilisée, conjointement avec la répartition des doses individuelles, pour éclairer les décisions visant à trouver un équilibre optimal entre des expositions relativement élevées pour un petit nombre de travailleurs et des expositions plus faibles pour un plus grand nombre de travailleurs. Pour les expositions du public, elle peut être utilisée dans le cadre du processus d'optimisation pour les situations d'exposition planifiées, existantes et d'urgence. Pour les expositions professionnelles, publiques et médicales, elle a été utilisée pour comparer les niveaux d'exposition entre différents pays et les évolutions des niveaux de dose au fil du temps (par exemple, UNSCEAR, 2008 ; NCRP, 2019). Son utilisation pour prédire des effets potentiels/possibles sur la santé peut être utile dans des circonstances particulières – par exemple, pour éclairer les décisions concernant la nécessité d'un suivi médical ou épidémiologique – mais elle doit être abordée avec prudence et évaluée en tenant compte des taux de morbidité de base, de la répartition des doses dans le temps et l’espace, ainsi que des incertitudes dans l’estimation des doses et des risques. Le calcul du nombre de cas de cancer reposant sur des doses collectives efficaces impliquant des expositions extrêmement faibles à de très grandes populations doit être évité. En raison des grandes incertitudes associées à de telles estimations, les résultats seront plus susceptibles de prêter à confusion qu'informatifs. La Commission a fourni des conseils sur l'utilisation de la dose collective comme outil d'optimisation de la protection dans la publication 101 (ICRP, 2006), tenant compte de la nécessité de décomposer les doses lorsque cela est nécessaire, pour permettre une considération séparée des parties homogènes dans la distribution spatio-temporelle des doses.

Publication 148 de la CIPR: Pondération des differents rayonnements pour les animaux et les plantes de référence
Résumé
Il est reconnu depuis longtemps que l’impact biologique sur un organisme résultant d’une dose absorbée donnée (en gray, Gy) de rayonnement ionisant peut varier en fonction du type de rayonnement impliqué. Cette différence a été quantifiée expérimentalement et rapportée sous forme d’efficacité biologique relative (EBR) pour les différents types de rayonnement. Les valeurs d’EBR sont ainsi déterminées par le rapport des doses du type de rayonnement testé et d’un rayonnement de référence à faible transfert linéaire d’énergie (TLE) produisant le même niveau d’effet biologique observé. Les valeurs d’EBR ont été mesurées pour divers effets biologiques et diverses espèces, à partir de données issues d’expériences in vitro, incluant des lignées cellulaires humaines et animales, ainsi que d’expériences in vivo sur des animaux. Ces études ont montré que l’intensité d’un effet biologique dépend non seulement de la dose, du type et de l’énergie du rayonnement, mais également du débit de dose délivré et, plus important encore, de l’effet biologique étudié. La nécessité d’appliquer ces connaissances à la protection radiologique humaine a conduit à agréger et analyser les données d’EBR afin de fournir des « facteurs de pondération du rayonnement » ainsi que la définition de la grandeur de protection radiologique appelée « dose équivalente » (en sievert, Sv), où la dose absorbée est multipliée par le facteur de pondération du rayonnement approprié au type de rayonnement considéré. Alors que la protection des humains s’est concentrée sur la prévention des réactions tissulaires (effets déterministes) et sur la limitation des effets stochastiques (cancers/effets héréditaires), la protection du biote (faune et flore) s’est principalement intéressée aux effets pertinents pour la viabilité des populations. Cette publication examine les données d’EBR pertinentes pour le biote, en particulier pour un émetteur bêta de faible énergie (tritium) et pour les radionucléides émetteurs alpha. Pour le tritium, les valeurs rapportées sont centrées autour de 1,5 - 2 par rapport aux rayons X et de 2 - 2,5 par rapport aux rayons gamma ; les valeurs pour les particules alpha étant généralement nettement plus élevées. Il est proposé d’utiliser une dose absorbée pondérée par l’EBR à des fins de protection radiologique, avec une pondération d’EBR pour le biote de 1 pour tous les rayonnements à faible TLE et de 10 pour les particules alpha. L’utilisation d’une valeur unique de 1 pour tous les rayonnements à faible TLE est cohérente avec l’approche adoptée pour la radioprotection des humains. Cependant, si les expositions aux particules bêta du tritium ou à d'autres rayonnements de faible énergie et faible TLE sont estimées proches ou dans la plage des niveaux de référence dérivés pour la protection radiologique environnementale, l’utilisation de valeurs d’EBR plus élevées pourrait être justifiée.
Mots-clés: niveaux de référence dérivés pour la protection radiologique environnementale; efficacité biologique relative; tritium ; pondération des rayonnements
Publication 152 de la CIPR: Methode de calcul du detriment radiologique
Résumé
Le détriment radiologique est un concept développé par la Commission Internationale de Radioprotection (CIPR) pour quantifier l’impact sur la santé des effets stochastiques liés aux expositions aux rayonnements ionisants à faible dose et/ou faible débit de dose. Il est estimé à partir des risques de cancer sur la vie entière pour un ensemble d'organes et de tissus et du risque d'effets héréditaires, en tenant compte de la gravité de ces effets. Cette publication présente un rappel historique de la méthodologie de calcul du détriment depuis la Publication 26 de la CIPR puis une description détaillée de la procédure développée dans la Publication 103 de la CIPR. Les sources de données, les modèles de risque, les méthodes de calcul et le choix des valeurs des paramètres sont précisés. Une analyse de sensibilité a été réalisée afin d’identifier les paramètres et les modalités qui peuvent être des sources majeures de variation et d'incertitude dans le calcul du détriment radiologique. Cette analyse de sensibilité a montré que le sexe, l'âge à l'exposition, le facteur d'efficacité de la dose et du débit de dose, le choix de la valeur de dose utilisée dans le calcul du risque sur la vie entière et les fractions de létalité retenues ont un impact significatif sur la valeur du détriment radiologique. Bien que la méthodologie de calcul du détriment radiologique soit clairement établie, elle doit évoluer afin de refléter l’évolution des statistiques de santé de la population et les progrès dans la compréhension scientifique des effets des rayonnements sur la santé. À cet égard, certains paramètres d’importance doivent être mis à jour, tels que les données de référence sur la population et celles sur la gravité des cancers. Il est également important de tenir compte de l’évolution des modèles de risque de cancer sur la base des derniers résultats des études épidémiologiques. Cette Publication met également l’accent sur l'importance d'améliorer la compréhension du concept de détriment radiologique et la transparence de la méthodologie de calcul.
Mots-clés: Détriment radiologique ; effets stochastiques ; risque nominal ; analyse de sensibilité
Points principaux
- Le détriment radiologique est un concept développé par la Commission internationale de radioprotection pour quantifier l'impact sur la santé des effets stochastiques (cancers et effets héréditaires) d’une exposition aux rayonnements ionisants à faible dose et/ou faible débit de dose à des fins de radioprotection, en tenant compte à la fois de la probabilité d’occurrence et de la gravité de ces effets.
- La méthodologie de calcul du détriment radiologique comprend deux étapes principales : le calcul du risque nominal (estimation du risque moyen de cancer sur la vie entière et du risque d’effets héréditaires associés à l'exposition aux rayonnements ionisants) et l'ajustement sur la gravité des effets en termes de dégradation de la qualité de vie, de létalité et de perte d’espérance de vie. Les détails de la méthodologie sont fournis, ce qui permet de lever les ambiguïtés et de corriger certaines informations erronées de la Publication 103 (CIPR, 2007). Des erreurs de programmation ont en effet été constatées dans le calcul du risque nominal pour la population des travailleurs dans la Publication 103. La Commission précise que ces erreurs n'ont pas d'impact significatif sur la valeur du détriment radiologique, et n'ont pas d'implication sur le Système de radioprotection.
- Une analyse de sensibilité sur certains paramètres a montré que le sexe, l'âge à l'exposition, le facteur d'efficacité de la dose et du débit de dose, le choix de la valeur de dose utilisée pour le calcul du risque sur la vie entière et les fractions de létalité ont un impact significatif sur le résultat du calcul du détriment radiologique.
- La méthode de calcul du détriment radiologique doit faire l’objet d’une mise à jour pour mieux refléter les évolutions dans les données de référence sur la population, l’évaluation de la gravité des cancers, les variations du risque en fonction du sexe et de l'âge et entre différentes populations, l'évolution des modèles de risque de cancer, ou encore les progrès dans l'estimation du risque pour les effets héréditaires.
Synthèse
- Le concept de détriment radiologique a été développé par la Commission internationale de radioprotection (ci-après, la Commission) à des fins de radioprotection. Il est défini comme l'excès d'effets stochastiques pour un groupe d'individus (et leur descendance) exposés à de faibles doses de rayonnements ionisants par rapport à un groupe d’individus non exposés. Il est déterminé à partir d’estimations de risque sur la vie entière, moyennées sur le sexe et l’âge à l’exposition, pour un ensemble d'organes et de tissus, en tenant compte de la gravité des effets en termes de perte de qualité de vie, de létalité et de perte d’espérance de vie.
- La Commission a récemment engagé un examen approfondi du Système de radioprotection, en tenant compte des retours d'expériences pratiques et des progrès réalisés dans la compréhension scientifique des effets des rayonnements sur la santé depuis la publication de ses recommandations générales de 2007 (CIPR, 2007). La présente publication fait partie intégrante de cet examen.
- Le détriment radiologique est quantifié en supposant une relation linéaire sans seuil entre la dose et le risque (LNT) pour les effets stochastiques et en appliquant un facteur d'efficacité de la dose et du débit de dose (DDREF) de 2 pour les cancers solides. Le détriment radiologique est applicable à une gamme limitée de doses et de débits de dose.
- Les valeurs du détriment radiologique ne doivent pas être considérées comme des projections du nombre de cas de cancer ou de maladie héréditaire dans une population exposée, mais comme des inférences fondées sur des hypothèses raisonnables en matière de radioprotection.
- La méthodologie de calcul du détriment radiologique a évolué au fil des décennies depuis l’introduction de ce concept dans la Publication 22 (CIPR, 1973). Les développements méthodologiques les plus récents, présentés dans la Publication 103 (CIPR, 2007), s’articulent autour de deux étapes. La première partie est le calcul du risque nominal, qui est l'estimation moyenne, par groupe d'âge, du risque d'incidence de cancer sur la vie entière et du risque d'effets héréditaires associés à l'exposition aux rayonnements. Le risque d'incidence de cancer sur la vie entière est calculé pour chacune des populations de référence (hommes et femmes des populations euro-américaines et asiatiques), à l'exception des cancers de l’os et de la peau, et les résultats sont moyennés sur le sexe et la région géographique. La deuxième partie consiste à ajuster les risques nominaux ainsi calculés en fonction de la gravité des effets. Toutes les étapes du calcul sont exécutées séparément pour chaque organes/tissus ou groupe de tissus, et les valeurs résultantes sont additionnées pour aboutir au détriment radiologique.
- Le calcul des coefficients de risque nominaux comporte ainsi un certain nombre d'étapes séquentielles qui peuvent être résumées comme suit :
- Les taux de cancer de référence ont été calculés à partir des données d'incidence de cancer de populations asiatiques et euro-américaines sélectionnées afin de compiler les taux pour des populations représentatives dans différentes parties du monde.
- Des modèles de risque ont été appliqués pour les cancers de 9 organes/tissus, un groupe ‘autres cancers solides’ et la leucémie. Ces modèles ont été développés essentiellement à partir de l'analyse des données d'incidence de cancer issues de l'étude des survivants des bombardements atomiques de Hiroshima et Nagasaki. L'excès de risque relatif (ERR) et l'excès de risque absolu (EAR) ont été calculés en tenant compte des effets modificateurs du sexe, de l'âge à l'exposition et de l'âge atteint.
- Pour les cancers de l’os et de la peau, les risques d'incidence sur la vie entière indiqués dans la Publication 60 (CIPR, 1991) ont été utilisés comme estimations du risque nominal.
- La période de latence minimale considérée était de 5 ans pour tous les cancers, y compris la leucémie.
- Le risque d'incidence de cancer induit par l'exposition aux rayonnements ionisants (REIC) a été calculé pour une exposition unique à 0,1 Gy et multiplié par 10 pour obtenir le risque sur la vie entière par Gy pour chaque type de cancer. Ce risque a été calculé pour chaque âge à l'exposition – 0-89 ans pour l'ensemble de la population et 18-64 ans pour la population en âge de travailler – en cumulant le risque jusqu'à l'âge atteint de 94 ans.
- Les moyennes pondérées du REIC pour chaque âge à l'exposition ont été utilisées pour calculer le risque sur la vie entière moyenné sur l’âge. La pondération était proportionnelle à la distribution par âge et par sexe de la population de référence.
- Les estimations du risque sur la vie entières obtenues avec des modèles d’ERR et d’EAR ont été moyennées en fonction de pondérations ERR:EAR spécifiques pour chaque type de cancer.
- Les estimations du risque sur la vie entière ont été ajustées à la baisse par un DDREF de 2 pour les cancers solides, mais pas pour la leucémie pour laquelle un modèle linéaire-quadratique a été utilisé.
- La moyenne non pondérée des valeurs obtenues pour les populations de référence (hommes et femmes des populations euro-américaines et asiatiques) a abouti au risque nominal pour chaque organe ou tissu.
- Les risques de maladies héréditaires ont été estimés séparément et intégrés dans le résultat ci-dessus pour former un ensemble de coefficients de risque nominal.
- L'ajustement du risque nominal sur la gravité a été effectué en appliquant trois facteurs d'ajustement qui reflètent la létalité, la perte de qualité de vie et la perte d’espérance de vie. Ces paramètres sont indépendants de la dose. Ils ont été déterminés sur la base de données provenant de statistiques sur les cancers et sur des jugements d’experts. Les valeurs utilisées ne tiennent pas compte de différences entre classes d’âge, entre sexes ou entre populations.
- Des erreurs de programmation ont été constatées dans le calcul des risques nominaux pour la population en âge de travailler dans la Publication 103 (CIPR, 2007). La Commission note que ces erreurs n'ont pas d'impact sur les valeurs agrégées du détriment radiologique, et n'ont pas d'implication sur le Système de radioprotection.
- Une analyse de sensibilité spécifique a été réalisée pour 9 cancers solides, le groupe des autres cancers solides et la leucémie afin d'examiner l'impact potentiel des hypothèses et des valeurs de certains paramètres utilisés dans le calcul du détriment radiologique. Les résultats ont été classés en trois groupes, en fonction de leur niveau d'impact.
- Impact minimal (changement d'un facteur <1,5) : mesure du risque sur la vie entière, période de latence minimale, âge maximal atteint et facteur de qualité de vie minimal.
- Impact modéré (changement d'un facteur de 1,5 à 2 pour certains organes ou tissus) : couverture géographique de la population de référence, modèle de transfert et nombre relatif d'années de vie perdues sans cancer.
- Impact substantiel (modification d'un facteur 2 pour certains organes ou tissus) : sexe, âge à l'exposition, DDREF, hypothèse de dose dans le calcul du risque sur la vie entière et fraction de létalité.
- La méthode de calcul du détriment radiologique doit évoluer pour tenir compte des progrès réalisés dans la prise en charge des cancers par les systèmes de santé et dans la compréhension scientifique des effets des rayonnements. Il sera nécessaire d'actualiser les données relatives à la population de référence et d'en étendre la représentativité géographique. Les hypothèses de calcul du risque nominal, incluant le modèle LNT, le DDREF et le système de transfert des risques, devront être examinées à la lumière des dernières connaissances scientifiques. Les modèles de risque de cancer doivent être révisés sur la base de données épidémiologiques actualisées. Les données sur la gravité des cancers doivent être mises à jour et affinées, notamment en envisageant d'autres approches pour quantifier la gravité des maladies. Il est également souhaitable de revenir sur les modalités d'estimation du risque pour les effets héréditaires, en tenant compte des études récentes.
- Compte tenu de la variation du risque de cancer en fonction du sexe et de l'âge, il serait souhaitable de calculer les risques sur la vie entière séparément pour les hommes et les femmes et pour certains âges (groupes d'âge), et de faire la moyenne de ces estimations en dernière étape pour obtenir des valeurs moyennes pour la population. Cette approche établit une distinction claire entre l'évaluation des risques fondée sur la science et l'intégration ultérieure d’informations à des fins de radioprotection, permettant de mieux comprendre la construction du détriment radiologique. Les variations liées au sexe et à l'âge pourraine également être prises en compte dans la détermination des valeurs des facteurs de pondération tissulaire (wT). Une description détaillée de ces facteurs, sur différents ensembles de détriments relatifs, permettra de mieux comprendre la gamme de distribution et la représentativité des wT.
- Il existe de grandes incertitudes quant à la forme de la courbe dose-réponse pour les maladies du système circulatoire et les cataractes aux faibles doses et l’existence, ou non, d’un seuil de dose pour ces effets. La question de savoir s'il faut ou non les inclure dans le calcul du détriment radiologique reste ouverte.
- Il apparait de plus en plus important de garantir la transparence et la traçabilité du calcul du détriment radiologique. Une description précise des étapes de calcul est nécessaire, et le développement d'un logiciel en libre accès pour effectuer ces calculs pourrait être envisagé. Il est également souhaitable d'améliorer la façon dont le détriment radiologique est exprimé et communiqué afin que les non-spécialistes puissent avoir une compréhension aussi claire que possible des risques sanitaires liés aux rayonnements ionisants.
Publication 154 de la CIPR: Optimisation de la protection radiologique dans les techniques de radiologie numérique pour l'imagerie médicale
Résumé
L'utilisation de l'imagerie médicale continue d'augmenter, constituant la principale source d'exposition de la population aux rayonnements artificiels dans le monde. Le principe d'optimisation de la protection stipule que « la probabilité d’être exposé, le nombre de personnes exposées et l'ampleur de leurs doses individuelles doivent être aussi faibles que raisonnablement possible (ALARA), en tenant compte des facteurs économiques et sociaux ». L'optimisation en imagerie médicale va au-delà du principe ALARA en exigeant que les expositions individuelles des patients soient limitées au strict nécessaire pour atteindre les objectifs médicaux requis. En d'autres termes, le type, le nombre et la qualité des images doivent être suffisants pour obtenir les informations nécessaires au diagnostic ou à l'intervention. Les réductions de dose pour les procédures d'imagerie ou les procédures guidées par rayons X ne doivent pas compromettre la qualité des images au point de les rendre inadéquates pour l'objectif clinique.
La transition vers l'imagerie numérique a fourni des options polyvalentes d'acquisition, de post-traitement et de présentation permettant une disponibilité large et souvent immédiate de l'information sur les images. Cependant, comme les images sont ajustées pour une visualisation optimale, leur apparence peut ne pas indiquer si la dose est plus élevée que nécessaire. Néanmoins, les images numériques offrent des possibilités d'optimisation supplémentaires et permettent l'application de méthodes d'intelligence artificielle. L'optimisation de la protection radiologique en radiologie numérique (radiographie, fluoroscopie et scanographie) repose sur la sélection et l'installation des équipements, la conception et la construction des installations, le choix des paramètres optimaux des équipements, les méthodes opérationnelles quotidiennes, les programmes de contrôle de la qualité et la garantie que l'ensemble du personnel bénéficie d'une formation initiale et continue appropriée. Les doses de rayonnement reçues par les patients ont également des répercussions sur les doses reçues par le personnel. À mesure que les nouveaux équipements d'imagerie intègrent davantage d'options pour améliorer leurs performances, ils en deviennent plus complexes et moins facilement compréhensibles, de sorte que les opérateurs doivent recevoir une formation plus approfondie. Un suivi, un examen et une analyse continus des performances sont nécessaires pour améliorer et développer les protocoles d'imagerie.
Plusieurs aspects différents relatifs à l'optimisation de la protection sont présentés dans cette publication.
Le premier est la collaboration entre les radiologues ou autres praticiens médicaux en radiologie, les manipulateurs en électroradiologie médicale et les physiciens médicaux, chacun ayant des compétences clés qui ne peuvent contribuer efficacement au processus que si les individus travaillent ensemble au sein d'une même équipe. Le deuxième est la méthodologie et la technologie appropriées, avec les connaissances et l'expertise requises pour les utiliser efficacement. Le troisième aspect concerne les processus organisationnels qui garantissent l'exécution des tâches requises, telles que les tests de performance des équipements, l’étude des doses administrées aux patients et l'examen des protocoles. Les équipements, le financement et l'expertise varient considérablement d'un pays à l'autre, et la majorité des établissements ne disposent pas de tous les outils, des équipes de spécialistes et de l'expertise nécessaires pour exploiter pleinement toutes les possibilités à des fins d’optimisation. Par conséquent, cette publication définit des niveaux généraux d'optimisation que les différents établissements peuvent atteindre et à travers lesquels ils peuvent progresser par étape : Niveau D - préliminaire ; Niveau C - élémentaire ; Niveau B - intermédiaire ; et Niveau A - avancé. Les guides émis par les sociétés professionnelles peuvent s'avérer précieux pour aider les utilisateurs à évaluer les systèmes et à adopter les meilleures pratiques. Des exemples de systèmes et d'activités à mettre en place pour atteindre les différents niveaux sont présentés. Les établissements d'imagerie peuvent alors évaluer les dispositions qu'ils ont déjà prises et utiliser cette publication pour guider les décisions concernant les prochaines actions à entreprendre pour optimiser leurs services d'imagerie.
Points principaux
- L'optimisation de la radioprotection en imagerie diagnostique et pour les procédures radioguidées nécessite de fournir des images cliniques qui soient d'une qualité suffisante pour assurer un diagnostic précis et fiable pour chaque patient, tout en minimisant l´exposition aux rayonnements en fonction de la technologie d'imagerie appliquée.
- En imagerie médicale, l'optimisation de la protection se situe à deux niveaux : (i) la conception et la construction de l'équipement et de l'installation où il est utilisé ; et (ii) les procédures de travail quotidiennes effectuées par le personnel concerné. L'optimisation n'est possible que si l'ensemble du personnel est correctement formé à son rôle et si le fonctionnement de l'équipement est assuré par un programme complet d'assurance qualité, avec un suivi continu de la performance pour valider et développer les protocoles.
- Différents aspects contribuent à l'optimisation, tels que disposer d’équipes pour l’optimisation composées de radiologues, de manipulateurs et de physiciens médicaux, chacun utilisant ses propres compétences pour améliorer les performances de l'imagerie ; de la méthodologie et de la technologie associées à l'expertise nécessaire pour évaluer les performances ; et des processus organisationnels pour gérer l'amélioration de la qualité dans un cadre structuré.
- Les équipements numériques complexes de radiologie permettent de réduire les doses sans compromettre la qualité de l'image. Cela exige un haut niveau des connaissances et compétences de la part des professionnels de l'imagerie, car si les fonctionnalités sont mal utilisées, les doses reçues par les patients peuvent être inutilement élevées sans que cela soit perceptible. Tous les membres de l'équipe d'imagerie doivent recevoir l'expertise nécessaire par le biais d'une formation, mise à jour régulièrement, afin qu'ils comprennent parfaitement le fonctionnement de l'équipement.
- Le degré de mise en œuvre de l'optimisation par une organisation dépend du personnel, des installations, du niveau de connaissance et d'expérience disponible et du cadre réglementaire. Cette publication présente une approche stratifiée du développement de l'optimisation, avec de grandes catégories de systèmes que l'on peut s'attendre à voir mis en place pour atteindre différents niveaux : Niveau D - préliminaire ; Niveau C - de base ; Niveau B - intermédiaire ; et Niveau A - avancé. L'objectif est d'aider les responsables et le personnel à décider de la prochaine étape à franchir dans leur programme d'optimisation.
Synthèse
- L'optimisation est un principe clé de la radioprotection. Les expositions médicales constituent la principale source d’exposition des populations aux rayonnements ionisants artificiels dans le monde, rendant leur optimisation particulièrement importante. L'optimisation de la radioprotection pour l'imagerie exige que la dose de rayonnement soit minimisée tout en fournissant les images et informations nécessaires à l’objectif prévu. L’imagerie numérique englobe toutes les techniques radiologiques qui présentent des images sous forme numérique, dont l'apparence peut être modifiée sous la forme la mieux adaptée à l'objectif. Elle comprend la radiographie numérique, les techniques fluoroscopiques et la scanographie. L'accent mis sur la qualité de l'image est devenu crucial en radiologie numérique, avec des options d'acquisition, de post-traitement et de présentation de l'image plus polyvalentes. Ces techniques nécessitent un processus d'optimisation plus rigoureusement défini, une prise de conscience des facteurs techniques sous-jacents qui ne sont pas toujours évidents, et une compréhension de l'impact de la technologie de l'information sur l'image affichée. Le risque clinique d'une mauvaise prise en charge du patient résultant d'un examen pour lequel la dose a été réduite au point que la qualité de l'image est insuffisante pour permettre de caractériser les changements dans les tissus malades ou endommagés est susceptible d'être élevé par rapport à tout risque supplémentaire résultant d'une exposition plus élevée aux rayonnements qui donne une qualité d'image suffisante. Toutefois, les doses de rayonnement cumulées résultant de l'utilisation toujours croissante de la radiologie peuvent avoir des conséquences sur la santé qui, bien qu'elles ne soient pas immédiatement apparentes, pourraient se manifester ultérieurement. Il s'agit donc de trouver un équilibre entre différents types de risques (effets potentiels à long terme de la dose et conséquences cliniques plus immédiates), équilibre difficile à atteindre tant du point de vue technique que professionnel.
- Pour atteindre l’objectif d'optimisation, un établissement doit disposer d'un équipement d'imagerie suffisant et d'un personnel suffisamment formé à l'utilisation de cet équipement et des technologies de l'information disponibles. Le processus d'optimisation commence par la spécification de l'équipement nécessaire pour répondre aux besoins cliniques et se poursuit par l'achat, l'installation, la réception et la mise en service. Il inclut la maintenance et le programme d'assurance qualité qui se poursuivent tout au long du cycle de vie de l'équipement. L'optimisation se poursuit ensuite pendant l'utilisation clinique de l'équipement, avec les exigences relatives à la fourniture des informations cliniques nécessaires par les personnes qui orientent les patients vers des examens, selon des recommandations professionnelles reconnues, et suivant les processus appropriés pour communiquer et agir sur les résultats des procédures d'imagerie.
- L'optimisation exige l'apport de connaissances et de compétences sur de nombreux aspects de la création des images radiologiques, et donc la contribution de différents professionnels de santé travaillant en équipe. Un radiologue, un autre médecin spécialiste dûment formé ou un manipulateur en électroradiologie médicale (MERM) peut juger si la qualité de l'image est suffisante pour l'objectif du diagnostic. Un MERM doit connaître le fonctionnement pratique et les limites de l'équipement et des technologies de l'information associées, et avoir une connaissance de base des principes physiques de formation des images et de l'interprétation des données sur les images. Un physicien médical doit avoir une compréhension plus approfondie des principes physiques qui sous-tendent la création des images et être capable d'effectuer et d'interpréter les données relatives à la dose et à la qualité de l'image. Pour parvenir à l'optimisation, les trois spécialités, ainsi que les autres professionnels de la santé qui seront parfois impliqués, doivent avoir un respect mutuel pour leurs compétences individuelles et travailler ensemble en tant que groupe cohésif (défini ici par le terme « professionnalisme »). Malheureusement, au moment de la préparation de cette publication, les niveaux de connaissances et de compétences dans de nombreux pays sont souvent inadéquats pour parvenir à une bonne optimisation des systèmes de radiologie numérique plus complexes en raison du manque de ressources. La complexité technique et informatique croissante des équipements et des logiciels de radiologie souligne l'importance de la collaboration multiprofessionnelle et de la dépendance à l'égard des connaissances combinées de différents professionnels. Ces derniers doivent disposer de temps dédié pour travailler ensemble afin de relever les défis émergents en matière d'optimisation au fur et à mesure que de nouveaux équipements sont développés.
- L’imagerie numérique permet potentiellement d’obtenir des images avec des expositions plus faibles qu’auparavant avec les combinaisons film-écran, permettant d’adapter les niveaux aux exigences diagnostiques spécifiques des examens. De nouvelles techniques sont constamment développées pour améliorer la qualité de l'image et permettre d'obtenir des images diagnostiques avec des doses plus faibles pour le patient. Par exemple, les systèmes automatisés de contrôle de l'exposition sont continuellement développés pour être plus efficaces et garantir une qualité d'image constante tout en réduisant la dose au patient en adaptant le niveau de rayonnement à chaque procédure et au patient. Cependant, toutes ces fonctions introduisent des complexités supplémentaires et exigent que les paramètres soient choisis correctement. Si les utilisateurs ne les emploient pas efficacement parce qu'ils ne connaissent pas bien leur mode de fonctionnement, les doses reçues par les patients peuvent ne pas être optimales, et l'utilisateur ne s'en rendra pas compte. Par conséquent, les équipements plus complexes nécessitent un personnel bien informé et une formation poussée. Les connaissances et les compétences, combinées aux instruments et aux objets de test permettant d'évaluer les performances des équipements, constituent la base de l'optimisation (c.-à-d., méthodologie).
- Un élément clé de l'optimisation consiste à maintenir la dose de rayonnement reçue par le patient à un niveau aussi bas que possible, tout en conservant un niveau adéquat de qualité d'image et d'information diagnostique. Au niveau de base, cela nécessite des évaluations régulières des doses reçues par des groupes de patients, et des comparaisons avec les niveaux de référence diagnostiques pour confirmer leur acceptabilité. L'évolution des caractéristiques d'optimisation technique et des systèmes de gestion de la qualité permettra d'étendre le processus d'optimisation aux patients et aux procédures spécifiques, selon l'indication clinique. Les opérateurs doivent avoir les connaissances et les compétences nécessaires pour utiliser ces fonctions de manière appropriée, faute de quoi d'importantes opportunités seront perdues. Un tel niveau d'optimisation en fonction de l'indication et du patient est appliqué quotidiennement dans les services de radiologie et constitue une extension fondamentale du principe d'optimisation conventionnel (connu sous le nom de « ALARA ») tel qu'il est appliqué aux patients. L'orientation vers l'indication et la spécificité du patient relient directement le processus d'optimisation au processus de justification et leur permettent de se soutenir mutuellement et de former un processus unitaire pour la radioprotection.
- L'évaluation de la qualité de l'image dans le cadre des programmes d'assurance et de contrôle de la qualité implique généralement l'évaluation d'images cliniques par un radiologue expérimenté, un autre praticien médical approprié ou un manipulateur en électroradiologie médicale par rapport à des critères établis de bonne qualité d'image, ainsi que l'analyse objective d'images de fantômes par un physicien médical. D'autres améliorations pourraient être obtenues à l'avenir grâce à une évaluation automatisée de la qualité des images basée directement sur les images cliniques des patients, pouvant impliquer des algorithmes d'intelligence artificielle mis en œuvre directement dans les archives d'images ou les modalités d'imagerie. Quelle que soit la méthodologie actuelle ou future, le processus de mesure de la qualité de l'image implique de nombreux paramètres interdépendants et, en raison de sa nature globale, constitue un élément essentiel de l'évaluation générale des performances. Les résultats des évaluations de la qualité de l'image clinique, associés aux résultats des mesures de la dose reçue par le patient, contribuent à l'élaboration de protocoles d'examen optimisés à des fins cliniques. Pour s'assurer que les processus d'optimisation sont menés de manière cohérente, des systèmes de gestion doivent être mis en place pour confirmer que les mesures et les évaluations sont effectuées, pour s'assurer que les données disponibles issues de la pratique clinique et les mesures de performance sont utilisées pour ajuster les protocoles afin de remédier aux insuffisances, et pour surveiller les progrès réalisés (c'est-à-dire la gestion du processus).
- Le degré de mise en œuvre de l'optimisation en radiologie numérique par une organisation dépend du personnel, des installations et du niveau de connaissance et d'expérience disponibles. Pour ce qui concerne les aspects de professionnalisme, méthodologie et gestion du processus définis plus haut, les installations de radiologie atteindront différents niveaux de performance. La présente publication définit les grandes catégories, pour les systèmes en place, pour atteindre les différents niveaux d'optimisation : Niveau D - préliminaire ; Niveau C - de base ; Niveau B - intermédiaire ; et Niveau A - avancé. On espère que l'évaluation des dispositions déjà prises par les établissements de radiologie servira de guide pour décider des actions à entreprendre ensuite pour atteindre le niveau supérieur et améliorer l'optimisation. Il est également à noter que ces catégories (niveaux D, C, B et A) avec des méthodes d'optimisation de plus en plus avancées reflètent également la capacité croissante d'atteindre des processus d'optimisation centrés sur l'indication et spécifiques au patient.
- Un changement culturel est nécessaire pour permettre l'amélioration et le développement des méthodes d'optimisation et pour éviter que des processus essentiels ne soient négligés. L'optimisation ne sera possible que si les établissements investissent dans des effectifs suffisants pour faire fonctionner leurs équipements d'imagerie, et s'ils offrent à leur personnel une formation appropriée ainsi que des possibilités de développement professionnel continu. Cela commence dès l'entrée dans les professions de l´imagerie médicale, avec des enseignements adaptés pour la formation des nouveaux praticiens, incluant des opportunités d'apprentissage encadrées par des professionnels expérimentés. La connaissance et la compréhension sont essentielles à l'optimisation de l'imagerie radiologique. Le changement culturel nécessaire vers le multi-professionnalisme ne peut se réaliser que si les rôles et les compétences professionnels sont constitués pour soutenir ce changement fondamental.
- Cette publication fournit des conseils sur l'adaptation des niveaux de dose et de la qualité de l'image aux tâches cliniques, en tirant parti de la large gamme dynamique offerte par les équipements d'imagerie numérique. Les aspects pratiques qui dépendent de techniques spécifiques d'acquisition d'images radiographiques sont traités dans une publication complémentaire distincte.
Publication 157 de la CIPR: Éthique de la radioprotection des patients en situation de diagnostic et de traitement
Résumé
La publication 138 définit les fondements éthiques du système de radioprotection de la CIPR sur la base de valeurs fondamentales (bienfaisance et non-malfaisance, dignité, justice et prudence) et de valeurs procédurales (responsabilité ou obligation de rendre des comptes, transparence et inclusivité). L'objectif de la présente publication est de proposer une application pratique des valeurs pour les professions de la radioprotection médicale. La médecine ayant une longue histoire et une forte culture de l'éthique, cette publication commence par identifier les valeurs partagées et définit un langage commun entre l'éthique biomédicale et la radioprotection. Les valeurs fondamentales sont très similaires, avec l'autonomie de l'éthique biomédicale, qui peut être considérée comme un corollaire de la dignité, et le principe de précaution, qui peut être compris comme la mise en œuvre de la prudence. Ces dernières années, l'enseignement et la formation médicale ont mis l'accent sur les valeurs de solidarité, d'honnêteté et surtout d'empathie. Toutes ces valeurs sont définies et interprétées dans le contexte spécifique de l'utilisation des rayonnements ionisants en médecine. Pour ceux qui sont plus familiers avec la radioprotection, les implications éthiques de leurs actions sont décrites. A l'inverse, pour ceux qui ont déjà une bonne formation en éthique, cette publication met en évidence les spécificités des rayonnements ionisants qui méritent également d'être prises en compte. Afin de souligner la cohérence entre les valeurs associées à l'éthique biomédicale et celles associées à la radioprotection, cette publication propose de les combiner : dignité et autonomie ; bienfaisance et non-malfaisance ; prudence et précaution ; justice et solidarité ; transparence, responsabilité et honnêteté ; et inclusivité et empathie. Cela permet un examen structuré de situations pratiques d'un point de vue éthique. Dans un souci pratique et didactique, cette publication propose 21 scénarios réalistes (11 pour les procédures d'imagerie et 10 pour les radiothérapies). Des questions de sensibilisation sont fournies pour stimuler la réflexion et la discussion. L'objectif final est d'être capable d'utiliser les valeurs éthiques dans les situations cliniques d'imagerie et de thérapie. Un enseignement et une pratique de l'éthique sont essentiels pour les professionnels de la radiologie médicale tout au long de leur carrière. Un exemple de programme de connaissances, d'aptitudes et de compétences est proposé. Afin d'aider le lecteur dans un sujet théorique complexe, les messages clés sont répartis dans le texte sous forme de messages clés facilement compréhensibles. Bien qu'elle soit principalement destinée aux professionnels de la radioprotection médicale, cette publication s'adresse également aux autorités, aux patients et au public.
Points principaux
- La compréhension des principes de base de la radioprotection est une condition préalable absolue pour tous les professionnels de la santé qui travaillent avec des rayonnements à des fins de diagnostic ou de traitement. Cette compréhension est nécessaire mais non suffisante si elle ne s'accompagne pas d'une formation à l'éthique.
- Afin d'établir un terrain d'entente et d'ouvrir la voie à une analyse des situations pratiques fondée sur l'éthique, les valeurs de l'éthique biomédicale et celles identifiées dans la publication 138 (CIPR, 2018a) sont appariées : l'autonomie est liée à la dignité, la bienfaisance à la non-malfaisance, la précaution à la prudence, la solidarité à la justice, l'honnêteté à la transparence et à la responsabilité, et l'empathie à l'inclusivité. Ces valeurs sont définies et interprétées en relation avec l'éthique biomédicale, les codes d'éthique professionnelle et la pratique de la médecine.
- Les professionnels travaillant dans le domaine de la radioprotection en médecine sont tenus d'adhérer au code de déontologie de leur organisme de réglementation et de leur profession, ainsi qu'à celui de leur employeur, qui peut inclure des valeurs de responsabilité, de transparence, de sécurité et de focalisation sur le patient.
- Il incombe à chacun des divers groupes d'acteurs concernés par les soins de santé d'assurer une radioprotection et des valeurs éthiques solides et partagées. Chaque groupe concerné doit être responsabilisé et formé pour garantir que les patients sont examinés et traités correctement.
- Les estimations des doses de rayonnement doivent être consignées dans le dossier médical du patient. Les patients doivent avoir accès aux doses qu'ils reçoivent et se les faire expliquer, au même titre qu'ils ont accès aux dossiers de tous leurs soins. Le niveau et la manière de communiquer la dose, les bénéfices et les risques dépendent des besoins et du contexte culturel de chaque patient et de sa famille, qui sont abordés dans le cadre d'une prise de décision partagée.
- Les risques doivent être définis explicitement comme étant ceux qui sont connus avec certitude, ceux qui sont potentiels et ceux pour lesquels il existe une incertitude au sein de la communauté scientifique (ou qui ne sont pas encore totalement compris).
- Une méthode d'analyse de situations réelles ou hypothétiques d'un point de vue éthique est proposée. Elle consiste à examiner la conformité et la non-conformité d'une situation par rapport à des valeurs éthiques appariées. Cela permet de mettre en évidence les forces et les faiblesses d'une situation, et donc d'identifier plus facilement ce qui pourrait être amélioré. La méthode peut être utilisée de manière rétroactive dans un cadre pédagogique, mais aussi de manière proactive pour résoudre un problème en cours.
Messages clés
Message clé 1
"La radioprotection n'est pas seulement une question scientifique. C'est un problème de philosophie, de morale et de sagesse suprême" (Taylor, 1956).
Message clé 2
L'examen des événements historiques significatifs est important, non pas pour juger en soi, mais pour apprendre. Des pratiques conformes à la loi et aux directives peuvent avoir eu des aspects éthiquement problématiques au moment où elles ont été mises en œuvre.
Message clé 3
La dose de rayonnement et le risque individuels - tels que nous les comprenons - n'ont pas été divulgués aux patients dans la pratique courante ; cela doit changer pour que ces données ne soient pas différentes de toutes les autres informations relatives à la santé des patients.
Message clé 4
Cette publication s'appuie sur la publication 138 (CIPR, 2018a) en ramenant les valeurs éthiques qui sous-tendent les principes de radioprotection dans le contexte des soins aux patients et de la prise de décision médicale.
Message clé 5
Dans l'application médicale des rayonnements, l'éthique biomédicale de la pratique professionnelle est fermement en place.
Message clé 6
Les professionnels de santé respectent la dignité et l'autonomie en permettant au patient de participer au consentement éclairé des procédures. Ils respectent également la dignité et l'autonomie en adaptant les procédures radiologiques aux besoins culturels et médicaux spécifiques du patient et en garantissant la confidentialité des interactions entre le patient et le professionnel.
Message clé 7
La bienfaisance et la non-malfaisance (c'est-à-dire les avantages et les risques) ne peuvent être dissociées dans le cadre de l'utilisation des technologies de la radiation en médecine. À titre de justification, le fait d'épargner au patient une exposition aux rayonnements mais de ne pas répondre à la question clinique n'est pas bénéfique pour le patient.
Message clé 8
L'utilisation de l'imagerie par rayonnements non ionisants lorsque cela est possible est une pratique prudente et de bonne qualité, mais elle doit être équilibrée dans le contexte des besoins individuels du patient et ne doit pas nuire à un diagnostic précoce ou à un traitement précis.
Message clé 9
La justice et la solidarité reflètent un équilibre entre le bénéfice individuel, l'efficacité et la durabilité, et l'égalité d'accès aux soins de santé pour tous.
Message clé 10
La responsabilisation est fondamentale pour la qualité et la sécurité cliniques. Elle implique un examen permanent des performances en vue d'une amélioration.
Message clé 11
L'honnêteté et la transparence sont des responsabilités partagées par les professionnels et les institutions à tous les stades de la gestion et de la déclaration des événements indésirables.
Message clé 12
Le niveau et la manière de communiquer la dose, le bénéfice et le risque dépendent des besoins et du contexte culturel de chaque patient et de sa famille, qui sont abordés dans le cadre d'une prise de décision partagée.
Message clé 13
Les estimations de la dose de rayonnement doivent être consignées dans le dossier médical électronique du patient. Les patients doivent avoir accès aux doses qu'ils reçoivent et se les faire expliquer, tout comme ils ont accès aux médicaments, aux procédures et aux informations du personnel soignant dans leur dossier médical.
Message clé 14
L'empathie améliore la satisfaction des patients à l'égard des soins, la précision des diagnostics et les résultats des traitements. L'empathie peut être enseignée et apprise, et chaque professionnel de santé devrait s'efforcer en permanence de l'atteindre.
Message clé 15
Les professionnels de la radioprotection en médecine sont tenus de se conformer au code de déontologie de leurs organismes réglementaires et professionnels, ainsi qu'à celui de leur employeur, qui peut inclure des valeurs de responsabilité, de transparence, de sécurité et de focalisation sur le patient.
Message clé 16
Consultez les codes de déontologie nationaux ou internationaux de votre profession pour obtenir une formulation concise des valeurs éthiques fondamentales qui guident la pratique.
Message clé 17
Les comités d'éthique nationaux et internationaux fournissent des recommandations sur les questions éthiques émergentes. Les comités d'éthique institutionnels locaux doivent avoir accès à l'expertise en radioprotection afin de fournir des conseils et une formation sur des dilemmes spécifiques à la pratique.
Message clé 18
La prise de décision partagée concernant l'utilisation des rayonnements à des fins médicales est à la base des soins centrés sur le patient et implique la transparence sur la nature des rayonnements, leurs avantages et leurs risques. Toutes les parties prenantes doivent jouer un rôle.
Message clé 19
Le respect de la sphère privée, compatible avec la réalisation des objectifs diagnostiques et thérapeutiques, et le respect de la confidentialité dans le traitement de toutes les informations relatives au patient, y compris les images, sont importants pour le bon déroulement des soins et le respect de la dignité et de l'autonomie.
Message clé 20
Le développement d'une compréhension commune des évolutions des objectifs de soins est particulièrement important pour une bonne prise de décision partagée dans le cadre des soins de fin de vie.
Message clé 21
En évitant et en gérant les conflits d'intérêts, on contribue à ce que les services médicaux et les décisions soient axés sur le bien du patient.
Message clé 22
La culture de sûreté radiologique intègre les connaissances, les compétences, les attitudes et les comportements qui sous-tendent les choix éclairés et la prise de décision partagée par les experts et les profanes dans le contexte de la "radioprotection sous tous ses aspects pour les travailleurs, les patients, la population et l'environnement, et dans toutes les situations d'exposition, en combinant les dimensions scientifiques et sociales" (IRPA, 2014).
Message clé 23
La CIPR considère le modèle linéaire sans seuil comme la meilleure approche pratique pour gérer les risques stochastiques liés à l'exposition aux rayonnements. Cette approche repose sur les sciences naturelles et les valeurs éthiques de prudence et de précaution.
Message clé 24
Les professionnels de santé doivent informer les patients non seulement des bénéfices et des risques, mais aussi de l'incertitude des bénéfices/risques et de son importance exacte. Cela repose sur les valeurs éthiques de transparence et d'honnêteté. La valeur de l'empathie doit également être prise en compte, car certains patients peuvent ne pas vouloir savoir ou peuvent craindre de découvrir le niveau d'incertitude.
Message clé 25
Lorsqu'une personne est exposée à des rayonnements ionisants, il est important de prendre en considération les caractéristiques de cette personne. Les valeurs éthiques de justice et de solidarité, ainsi que le principe d'optimisation, doivent être mis en pratique lorsque, par exemple, des patientes enceintes et des enfants doivent subir une tomodensitométrie ou une procédure interventionnelle.
Message clé 26
Il incombe à chacun des divers intervenants de garantir une protection radiologique et des valeurs éthiques solides dans le domaine des soins de santé. Chaque partie prenante doit être responsabilisée et formée pour s'assurer que les patients sont examinés et traités correctement.
Message clé 27
Bien qu'il puisse être utile d'intégrer l'enseignement de l'éthique dans la formation pratique quotidienne, il est nécessaire de fournir un enseignement spécifique et pratique sur l'éthique.
Message clé 28
Les campagnes de radioprotection ont amélioré les connaissances des consommateurs en matière de radioprotection et ont apporté des valeurs éthiques transparentes à toutes les parties prenantes.
Message clé 29
La compréhension des principes de base de la radioprotection est une condition préalable absolue - cette compréhension est nécessaire mais non suffisante si elle ne s'accompagne pas d'une formation à l'éthique - pour tous les professionnels de la santé qui travaillent avec des rayonnements à des fins de diagnostic ou de traitement.
Message clé 30
Le modèle de taxonomie de Bloom permet à ceux qui enseignent de définir des objectifs d'apprentissage basés sur les connaissances, les aptitudes et les compétences nécessaires aux professionnels de la santé pour prendre des décisions éthiques mûrement réfléchies lors de l'utilisation des rayonnements en médecine.
Publication 159 de la CIPR: Radioprotection pour le stockage de déchets radioactifs solides en surface ou à faible profondeur
Résumé
Cette publication fournit une mise à jour des recommandations de la Commission internationale de protection radiologique pour l'application des principes fondamentaux de radioprotection pour le stockage des déchets radioactifs dans une installation de stockage en surface ou à faible profondeur. L'objectif d'un système de stockage en surface ou à faible profondeur est d'assurer la protection des personnes et de l'environnement, adaptée aux circonstances, contre les dangers associés aux déchets radioactifs. L'application du système de radioprotection pour une installation de stockage en surface ou à faible profondeur comprend la justification de la pratique générant les déchets et est envisagée dans le contexte d'une situation d'exposition planifiée. La conception de l'installation prend en compte le potentiel d'exposition des personnes et de l'environnement associé à son évolution prévue, en tenant compte des défaillances raisonnablement prévisibles. L'optimisation de la protection est une évaluation itérative, systématique et transparente des options de protection visant à réduire les impacts sur les personnes et l'environnement. L'optimisation est essentielle à toutes les phases de vie de l’installation et revêt une importance particulière dans la phase de conception, car elle déterminera les performances de l'installation dans les phases d'exploitation et de post-fermeture. Pour faire face aux scénarios à long terme et à faible probabilité, l'optimisation doit être complétée par des aspects tels que la robustesse, la défense en profondeur, etc., afin de garantir que des mesures raisonnables ont été prises pour maintenir l'intégrité à long terme de l'installation. En cas d'événements perturbateurs naturels graves ou d'intrusion humaine au-delà des limites de conception, l'application du système de protection radiologique doit être envisagée en référence aux situations d'exposition existantes. En raison de la nature des dangers et des échelles de temps associées, la stratégie fondamentale adoptée pour le stockage des déchets radioactifs de faible et très faible activité consiste à : confiner et isoler les déchets jusqu'à ce que les radionucléides à vie courte aient décru à des niveaux qui ne peuvent plus donner lieu à des expositions significatives ; et limiter la teneur en activité des radionucléides à vie plus longue afin de garantir que les doses et les risques soient également limités à long terme, lorsque les capacités de confinement et d'isolement peuvent diminuer. La mise en œuvre réussie de cette stratégie est démontrée par un dossier de sûreté structuré. Les options spécifiques pour une installation de stockage en surface et à faible profondeur dépendront de la situation particulière, notamment de la nature des déchets, de l'environnement physique local et du contexte sociétal. Le dialogue entre l'exploitant, les autorités et les parties prenantes doit être établi le plus tôt possible dans le processus, en incluant des valeurs éthiques pour contribuer à promouvoir une compréhension commune de l'application du système de protection radiologique.
Mots clés: stockage de surface ; stockage à faible profondeur ; déchets radioactifs solides ; valeurs éthiques ; cycle de vie ; base de conception
Points principaux
- Le système de protection radiologique s'applique au stockage en surface et à faible profondeur des déchets radioactifs solides dans le cadre d'une situation d'exposition planifiée, en tenant compte des échelles de temps et des incertitudes associées.Les expositions possibles des personnes et de l'environnement associées à l'évolution prévue de l'installation de stockage en surface et à faible profondeur, incluse dans la base de conception, sont considérées comme des situations d'exposition planifiées.
- L’optimisation de la protection est essentielle tout au long des phases de vie d’une installation de stockage de surface et à faible profondeur et revêt une importance particulière lors de la phase de conception, car elle déterminera les performances de l’installation dans les phases opérationnelles et post-fermeture.
- L’optimisation de la protection, lorsqu’elle est appliquée au développement et à la mise en œuvre d’un système de stockage en surface et à faible profondeur, doit être comprise au sens le plus large comme une évaluation itérative, systématique et transparente des options de protection visant à maintenir les impacts sur les personnes et sur l’environnement aussi bas que raisonnablement possible.
- Des mécanismes appropriés de dialogue formel et structuré entre le régulateur et l’opérateur et avec les parties prenantes doivent être mis en place le plus tôt possible dans le processus.La prise en compte des valeurs éthiques dans le dialogue est importante et peut contribuer à promouvoir une compréhension commune.
- Les incertitudes liées aux expositions futures doivent tenir compte à la fois de l’ampleur et de la probabilité de leur occurrence. Les scénarios impliquant une intrusion humaine nécessitent une attention particulière.
Figure 2. Représentation stylisée de la classification des déchets radioactifs de l’AIEA

Fig. 4. Aperçu des phases du cycle de vie d'une installation de stockage en surface ou à faible profondeur

Tableau 1. Critères et objectifs de protection radiologique recommandés pour le dépôt en surface

Conclusions
- Le présent rapport décrit et clarifie l’application des recommandations de la Commission pour la protection du public et des travailleurs (Publications 101 et 103) ainsi que de l’environnement (Publication 124) applicables au stockage en surface et à faible profondeur des déchets radioactifs.Il complète la Publication 122 qui traite de la radioprotection pour le stockage géologique des déchets radioactifs à vie longue.
- Il existe de nombreux types de déchets radioactifs solides susceptibles d'être stockés dans une installation à faible profondeur, présentant une large gamme de propriétés radiologiques et physiques provenant de diverses industries et activités humaines.Quelle que soit leur source et leurs propriétés, la protection des travailleurs, du public et de l'environnement doit être démontrée, assurée et optimisée.Outre l'installation de stockage proprement dite, le système de gestion des déchets dans son ensemble doit être pris en compte, car les choix effectués dans les processus avant le stockage peuvent influencer l'option de stockage.
- Les installations de stockage en surface ou à faible profondeur sont destinées à assurer le degré de confinement et d'isolement nécessaire pour les échelles de temps pendant lesquelles les déchets présentent un risque radiologique important.Pour les radionucléides à courte durée de vie, cette période sera de plusieurs centaines d'années.Pour les radionucléides à longue durée de vie, cette période sera plus longue, mais les restrictions sur l'inventaire des déchets stockés limiteront le risque résiduel à long terme.Le confinement et l'isolement sont assurés par des barrières physiques et pour aider à garantir la continuité de leur intégrité, des mesures telles que la surveillance institutionnelle de l'accès au site de stockage et les restrictions sur l'utilisation des terres associées au site sont importantes.Le choix du site est tel que, dans la mesure du possible, les événements perturbateurs graves soient évités et la probabilité d'intrusion humaine par inadvertance soit réduite.Un dossier de sûreté doit démontrer l'adéquation de l'installation de stockage aux déchets destinés à être stockés.Cela est réalisé en partie en assurant le confinement et l'isolement aussi longtemps que nécessaire, avec une exposition limitée des travailleurs, du public et de l'environnement.
- Les déchets peuvent provenir de tous types de situations d'exposition et une fois que la gestion des déchets commence, les activités associées sont mieux décrites comme une situation d'exposition planifiée, bien que certaines situations puissent être plus nuancées.Bien que l'introduction délibérée d'une installation de stockage en surface ou à faible profondeur soit considérée comme une situation d'exposition planifiée, les expositions provenant de l'installation ne sont pas prévues comme telles.L'objectif du stockage des déchets radioactifs est d'éviter et/ou de réduire les expositions dans la mesure du possible, à la fois durant la phase opérationnelle (mise en place des déchets et fermeture) et durant la phase de post-fermeture lorsque l'installation est fermée et fonctionne comme un système passif.Il faut également tenir compte des événements plus perturbateurs (par exemple une intrusion) qui peuvent entraîner une situation d’exposition d'urgence ou une exposition d’exposition existante.
- Le système de radioprotection de la CIPR repose sur trois principes : la justification, l’optimisation et la limitation des doses individuelles.Leur mise en œuvre réussie nécessite de prendre en compte les valeurs éthiques fondamentales, à savoir que le stockage des déchets radioactifs doit être bénéfique et éviter tout préjudice (bienfaisance/non-malfaisance), que les risques inutiles doivent être évités (prudence), que la répartition inéquitable des risques doit être évitée (justice) et que les personnes doivent être traitées avec respect (dignité).
- Pour un système de stockage en surface ou à faible profondeur, l'optimisation de la protection doit prendre en compte la protection des personnes et de l'environnement pendant la période d'exploitation et la protection des générations futures et de l'environnement au-delà de la fermeture de l'installation, y compris pour une période où l'on suppose que la mémoire de l'installation sera perdue et qu'il n'y a plus de surveillance sur l'installation.À long terme et en particulier lorsqu'il n'y a pas de surveillance active en place, la protection radiologique doit être assurée par un système de stockage fonctionnant de manière passive.L'optimisation de la protection doit tenir compte de l'équilibre entre les mesures de sûreté passives et actives, par exemple lors de la décision sur la durée prévue et la nature des mesures de surveillance institutionnelle.
- Pour trouver un équilibre entre les nombreux facteurs nécessaires à l'optimisation de la protection radiologique de l'installation, il faudra prendre des décisions prudentes, parfois avec une connaissance incomplète (par exemple, les conditions environnementales à long terme, les scénarios possibles d'intrusion humaine involontaire, etc.).La prudence est de mise pour éviter d'imposer une charge excessive aux générations actuelles ou futures.Cela soulève naturellement la question de la justice distributive ainsi que de la dignité des générations actuelles et futures.Les installations de stockage en surface ou à faible profondeur doivent être conçues et exploitées de manière à offrir un niveau élevé d'assurance de protection adéquate à tous les membres des générations actuelles et futures et à l'environnement.
- La mise en œuvre et l’intégration des valeurs éthiques procédurales de responsabilité, de transparence et de participation des parties prenantes tout au long du projet devraient aider l’autorité réglementaire et les parties prenantes à avoir confiance dans la performance à long terme de l’installation pour contrôler le relâchement et la migration des radionucléides de l’installation et répondre aux critères de protection radiologique.
- Lorsqu'une installation passe de la phase d'exploitation à la phase de post-fermeture, une autorité désignée peut contrôler l'utilisation des sols et peut également procéder à des inspections périodiques du site pour s'assurer que les conditions retenues dans le dossier de sûreté de post-fermeture restent valables.Il faut également supposer qu'à un moment donné dans le futur, le contrôle de l'installation peut cesser, ce qui signifie qu'il est important de maintenir la surveillance jusqu'à ce que l'on soit sûr que les critères de performance à long terme, y compris ceux relatifs à l'intrusion humaine involontaire, sont satisfaits.
Glossaire
Meilleures techniques disponibles (MTD)
Les techniques disponibles les plus efficaces et les plus avancées qui permettront d'établir et de maintenir la robustesse et l'intégrité à long terme de l'installation.
Biosphère
Partie de l’ “environnement” normalement habitée par des organismes vivants. Dans la pratique, la “biosphère” n’est habituellement pas définie avec une grande précision, mais on considère généralement qu’elle comprend l’atmosphère et la surface de la Terre, y compris le sol et les masses d’eau de surface, les mers et les océans et leurs sédiments. Il n’existe pas de définition généralement acceptée de la profondeur sous la surface à laquelle le sol ou les sédiments cessent de faire partie de la “biosphère”, mais on pourrait considérer qu’il s’agit de la profondeur affectée par les activités humaines de base. Dans la “sûreté” de la “gestion des déchets radioactifs”, en particulier, la “biosphère” est normalement distinguée de la “géosphère”.
Source scellée hors service
Une source radioactive, constituée de matières radioactives scellées de manière permanente dans une capsule ou étroitement liées et sous forme solide (à l'exclusion des éléments combustibles de réacteur), qui n'est plus utilisée et n'est pas destinée à être utilisée pour la pratique pour laquelle une autorisation a été accordée. (AIEA, 2018)
Situation d’exposition
Une situation dans laquelle une source de rayonnement naturelle ou artificielle, par diverses voies, entraîne une exposition des personnes ou du biote non humain dans l’environnement.
Intrusion humaine
Actions humaines entraînant une perturbation directe de l’installation de stockage elle-même (par exemple les déchets ou les barrières artificielles).
Installation de stockage à faible profondeur
Installation de stockage de déchets radioactifs située à quelques dizaines de mètres de la surface terrestre.
Risque
Probabilité de conséquences néfastes ou préjudiciables (par exemple, cancer) associées à des expositions réelles ou potentielles au cours d'une année. Il prend en compte la probabilité de recevoir une dose au cours d'une année et la probabilité que la dose reçue entraîne un préjudice. Risque = probabilité d'occurrence × gravité si l'incident se produit.
Dossier de sûreté
Un dossier de sûreté est un ensemble structuré d'arguments et de preuves démontrant la sûreté d'un système. Plus précisément, un dossier de sûreté vise à démontrer que des objectifs et des critères spécifiques sont respectés dans le but de protéger l’homme et l'environnement contre les dangers des rayonnements.