Traductions françaises des résumés de la CIPR

Rapport de l'ICRU 95 et Publications 124 - 146
 
Rapport de l'ICRU 95: Grandeurs opérationnelles pour l'exposition au rayonnement externe
Résumé

Les grandeurs opérationnelles utilisées en radioprotection externe sont mesurables et complètent les grandeurs de protection qui, par nature, ne sont pas mesurables. Les grandeurs opérationnelles sont utilisées pour les évaluations prospectives et rétrospectives des champs de rayonnement, que ce soit par mesure ou par calcul. Les dosimètres individuels et les instruments de surveillance de zone sont conçus pour indiquer les grandeurs opérationnelles et sont couramment étalonnés avec des champs de rayonnement standard qui peuvent être mis en relation avec les grandeurs opérationnelles.

La dose efficace est une grandeur de protection fondamentale de la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) (2007). Les définitions des quantités opérationnelles pour l'équivalent de dose individuel et ambiant dans le rapport 39 (1985), le rapport 43 (1988) et le rapport 51 (1993) de la Commission internationale des unités et mesures radiologiques (ICRU) donnent des estimations acceptables de la dose efficace pour des expositions aux photons dans la gamme d'énergie allant de 70 keV à 3 MeV. En dehors de cette gamme d'énergie, les grandeurs opérationnelles définies dans les rapports 39 et 51 de l'ICRU sont significativement différentes : à basse énergie, elles surestiment les grandeurs de protection, alors qu'à haute énergie, elles les sous-estiment. En outre, les coefficients de conversion donnés pour les grandeurs opérationnelles n'ont été calculés que pour un sous-ensemble de particules limité aux photons, aux électrons et aux neutrons.

Le présent rapport recommande d'autres définitions des grandeurs opérationnelles qui permettent de mieux estimer les grandeurs de protection que celles qui ont été données précédemment. Les coefficients de conversion se rapportant aux grandeurs physiques des champs de radiation (la fluence et, pour les photons, le kerma dans l'air) sont donnés sur de larges gammes d'énergie pour les photons, les électrons, les neutrons, les protons, les muons, les pions et les ions d'hélium. Ce rapport recommande que les fabricants et les concepteurs d'instruments travaillent à la mise au point de dosimètres et d'instruments adaptés qui fournissent des mesures précises et conformes à ces recommandations. Ce rapport recommande également que les autorités internationales et nationales reconnaissent la nécessité d'une période d'adoption progressive et prudente afin d'équilibrer les coûts de mise en œuvre avec les avantages d'un système de grandeurs opérationnelles qui soit plus cohérent avec les grandeurs de protection qu'elles mesurent.

Mots clés: Rayonnement; Situations d’exposition; Protection de l’environnement; Biote

Résumé Exécutif

La législation et la réglementation actuelles en matière de radioprotection à travers le monde reposent sur trois principes fondamentaux : la justification, la limitation et l'optimisation de l'exposition des êtres humains aux rayonnements ionisants, introduits par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR) dans sa publication 26 (1977). La mise en œuvre pratique des principes de limitation et d'optimisation nécessite une mesure quantitative de l'exposition aux rayonnements. En 1978, la CIPR a défini à cette fin une grandeur de protection appelée équivalent de dose efficace (HE). Dans la publication 60 de la CIPR (1991), HE a été remplacé par une grandeur apparentée, la dose efficace, E. Comme HE, E est une mesure de l'exposition du corps entier, et elle est utilisée au niveau international pour fixer des limites d'exposition et pour guider quantitativement la mise en œuvre pratique du principe d'optimisation pour le contrôle des effets stochastiques induits par les rayonnements.

La dose efficace au corps entier est définie comme suit

(1)   

Les doses absorbées moyennes DT,R des tissus et des organes T spécifiés dans le corps humain sont chacune pondérée par des facteurs de pondération des rayonnements, wR pour tous les types de rayonnements incidents R. Ce terme est appelé dose équivalente au tissu ou à l'organe T. La dose efficace, E, est la moyenne pondérée des doses équivalentes, en utilisant des facteurs de pondération des tissus pour tenir compte des contributions relatives des organes et des tissus au détriment stochastique total (c'est-à-dire que tous les wT < 1 et ΣwT = 1).

La dose efficace due à l'exposition au rayonnement externe est liée aux grandeurs caractérisant le champ de rayonnement, généralement la fluence de particules ou, pour les photons, le kerma dans l'air. Les coefficients de conversion h reliant les grandeurs du champ à la dose efficace ont été calculés en évaluant numériquement l'équation (1) dans des fantômes mathématiques anthropomorphes de référence (CIPR, 2009) pour huit orientations géométriques standard du champ de rayonnement incident (CIPR, 2010).

La grandeur de protection qu'est la dose efficace n'est pas définie en un seul point, mais comme une moyenne sur les organes et sur l'ensemble du corps. Elle ne peut donc pas être mesurée directement. La Commission internationale des unités et mesures de rayonnement (ICRU) a défini un ensemble de grandeurs opérationnelles (mesurables) basées sur l'équivalent de dose [rapport ICRU 39(1985), rapport ICRU 51(1993)], en tant qu'estimateur de la dose efficace pour l'exposition aux rayonnements externes, complétant l'ensemble des grandeurs de protection. L'équivalent de dose est défini comme le produit d'une dose absorbée et d'un facteur de qualité.

(2)   

La dose absorbée, D, est évaluée en un point situé à une profondeur spécifiée d dans le corps ou dans un fantôme. Pour la surveillance du corps entier, d a été choisi comme étant de 10 mm. Le facteur de qualité Q est fonction du transfert d'énergie linéique (LET ou L) des particules au point d'interaction (ICRU, 1993).

Le système de grandeurs opérationnelles des rapports 39 et 51 de l'ICRU fait la distinction entre les grandeurs pour la surveillance des rayonnements des personnes (équivalent de dose individuel) et des zones (équivalent de dose directionnel et équivalent de dose directionnel ambiant). Alors que l'équivalent de dose individuel Hp(d) est défini à d mm (généralement 10 mm) à « l'emplacement représentatif sur le corps », l'équivalent de dose directionnel, H′(d), et l'équivalent de dose ambiant H*(d) sont définis à la profondeur spécifiée dans la sphère ICRU composée de tissus à 4 composants de l'ICRU et d'un diamètre de 30 cm (ICRU, 1993). L'équivalent de dose ambiant est rendu indépendant de la direction du rayonnement incident en élargissant et en alignant virtuellement tous les vecteurs de champ.

Les grandeurs de protection et les grandeurs opérationnelles diffèrent dans leurs définitions et dans les fantômes utilisés pour calculer les coefficients respectifs à partir des grandeurs du champ de rayonnement:

  1. Le calcul des coefficients de conversion pour la dose efficace et les grandeurs opérationnelles a été et est effectué à l'aide de fantômes et de codes de transport des rayonnements. Pour la dose équivalente aux organes et aux tissus et donc pour la dose efficace, des fantômes anthropomorphes ont été utilisés, plus récemment les fantômes adultes de référence de la CIPR/ICRU (CIPR, 2010). Pour le calcul des coefficients de conversion des grandeurs opérationnelles (utilisées pour l'étalonnage des moniteurs de radioprotection), des fantômes géométriquement plus simples ont été utilisés : la sphère ICRU pour l'équivalent de dose ambiant et un fantôme en forme de plaque (avec des dimensions de 300 mm × 300 mm × 150 mm) pour l'équivalent de dose individuel. Les différences géométriques et structurelles correspondantes fixent des limites à la qualité des estimations des valeurs de la dose efficace à partir des mesures des grandeurs opérationnelles. La sphère ICRU ne ressemble guère au fantôme anthropomorphe et à sa structure anatomique utilisés dans le calcul de la dose efficace.
  2. L'évaluation de l'équivalent de dose individuel et ambiant à une profondeur d unique et définie ne reflète pas la complexité anatomique géométrique du corps humain et le calcul des coefficients de conversion pour E dans les fantômes anthropomorphes de référence en tant que moyenne pondérée des doses équivalentes à des organes et tissus spécifiés.
  3. Le facteur de qualité Q(L), utilisé dans le calcul de l'équivalent de dose, ainsi que le facteur de pondération du rayonnement, wR, utilisé pour la dose équivalente et la dose efficace, sont utilisés pour tenir compte des différences d'efficacité des différents types de rayonnement. Toutefois, ils reposent sur des approches différentes et ne sont pas totalement équivalents.
  4. Les coefficients de conversion publiés jusqu'à présent et largement appliqués pour les grandeurs opérationnelles des photons ont été calculés selon l'approximation du kerma. Cette approche simplifiée entraîne une surestimation des grandeurs de protection par les grandeurs opérationnelles à des énergies photoniques élevées.

Les différences en (1) et (2) sont les principales raisons des estimations inadéquates de la dose efficace par les valeurs mesurées des grandeurs opérationnelles pour certaines particules et énergies. Plus généralement, elles sont la principale raison des différences entre les coefficients de conversion de la dose efficace et ceux des grandeurs opérationnelles.

Ce rapport présente une définition alternative des grandeurs opérationnelles pour le rayonnement externe, qui permet de remédier aux insuffisances liées à leur utilisation en tant qu'estimateurs de la dose efficace. Dans ce rapport, les grandeurs opérationnelles sont définies comme le produit de la fluence de particules et d'un coefficient de conversion (Endo, 2016). Symboliquement, cela s'écrit comme suit

(3)   

Le coefficient de conversion de la dose efficace est calculé comme le quotient de la valeur de la dose efficace évaluée dans les fantômes de référence pour adultes de la CIPR/ICRU (CIPR, 2009) pour des directions d'incidence spécifiées, divisé par la fluence de particules en l'absence du fantôme, et le symbole du coefficient de conversion s'écrit comme suit:

(4)   

Les définitions (3) et (4) offrent une bonne cohérence numérique entre les valeurs des coefficients de conversion pour la dose efficace et les valeurs correspondantes pour les grandeurs opérationnelles. Ceci est principalement dû au fait que le fantôme pour le calcul des grandeurs de protection et des grandeurs opérationnelles est maintenant identique.

La grandeur permettant de contrôler l'exposition du corps entier des professionnels, appelée dose individuelle Hp, est le produit de la fluence de particules, Φ, et d'un coefficient de conversion dépendant de l'énergie Ep et de l'angle d'incidence Ω, hp(Ep,Ω). Les coefficients de conversion sont calculés dans le même fantôme anthropomorphe que la grandeur de protection qu'est la dose efficace E. Les coefficients de conversion sont donnés pour différents angles d'incidence sur la surface du corps afin de permettre l'évaluation de la dépendance angulaire des dosimètres individuels. Il est évident que les valeurs de Hp(Ep,0°) sont numériquement égales à E(AP) pour les mêmes énergies de particules.

La grandeur permettant d'évaluer les doses efficaces potentielles dans une zone donnée (principalement de manière prospective) est appelée dose ambiante H* et est définie, pour toutes les énergies des particules considérées, comme le maximum des valeurs de la dose efficace pour les différentes directions d'un champ de rayonnement incident sur un fantôme anthropomorphe, comme indiqué dans la publication 116 de la CIPR (2010). La sélection de la valeur maximale pour les différentes directions d'incidence garantit que la mesure de la dose ambiante fournit des estimations proches mais toujours prudentes de la dose efficace.

La radioprotection ne concerne pas seulement le contrôle des effets stochastiques, mais aussi celui des effets plus déterministes sur les tissus, en particulier sur le cristallin et la peau au niveau local. Pour chacun de ces effets, des limites d'exposition spécifiques ont été fixées en termes de dose équivalente. Dans la pratique, des grandeurs opérationnelles sont également utilisées pour la surveillance de l'exposition du cristallin et de la peau au niveau local. Pour la surveillance individuelle du cristallin, on utilise la grandeur opérationnelle de l'équivalent de dose individuel Hp(3) et, pour la peau au niveau local, il s'agit de l'équivalent de dose individuel Hp(0,07).

En ce qui concerne ces grandeurs opérationnelles pour le contrôle des effets sur les tissus pour le cristallin et la peau au niveau local, il est proposé dans ce rapport que les quantités basées sur la dose absorbée plutôt que sur la dose équivalente soient plus appropriées pour le contrôle des effets non stochastiques concernés. La grandeur opérationnelle de la dose absorbée individuelle au cristallin est définie dans le fantôme numérique de l'œil de la même manière que les calculs précédents des coefficients de conversion pour la dose équivalente de l'œil. La définition de la grandeur de la dose absorbée individuelle au niveau local de la peau est basée sur des fantômes mathématiques simplifiés du tronc, du bras et du doigt. Ils sont utilisés pour définir la grandeur et servent également de prescription de calcul sans ambiguïté pour les coefficients de conversion.

Le rapport fournit un ensemble complet de valeurs de coefficients de conversion pour les grandeurs proposées H* et Hp, pour les photons, les électrons, les positrons, les neutrons, les particules alpha, les muons positifs et négatifs, et les pions positifs et négatifs. La gamme d'énergie des données publiées dans ce rapport correspond aux gammes d'énergie utilisées dans la publication 116 de la CIPR ; pour les coefficients de conversion de la dose efficace, elle s'étend jusqu'à 10 GeV.

La définition proposée des grandeurs opérationnelles pour le contrôle des effets stochastiques entraîne des modifications de la dépendance énergétique des coefficients de conversion. Par conséquent, les coefficients d'étalonnage des dosimètres devront être réexaminés. Par exemple, les dosimètres individuels et les instruments de surveillance étalonnés en fonction des grandeurs opérationnelles de l'ICRU 39 et 51 pour les photons présenteront une réponse trop élevée en dessous d'une énergie de 70 keV. Dans la gamme d'énergie la plus courante, de 50 keV à 3 MeV, un simple réétalonnage suffira.

Le présent rapport représente un changement majeur dans la définition des grandeurs opérationnelles en radioprotection contre les rayonnements externes. Il en résulte une simplification du système des grandeurs utilisées en radioprotection opérationnelle, en alignant la définition des grandeurs de protection avec celles des grandeurs opérationnelles, et en éliminant les étapes intermédiaires qui sont complexes et peuvent prêter à confusion.

L'ensemble complet de coefficients de conversion inclus dans les annexes du rapport couvre une large gamme d'énergie et constituera une base solide pour la conception et l'étalonnage futurs des instruments et permettra des calculs prospectifs des champs de rayonnement. Il contribuera également à l'harmonisation de la surveillance de la radioprotection pour les types de rayonnements ionisants qui n'étaient pas pris en compte dans les publications précédentes.

Glossaire

Benthique
Relatif à la faune et à la flore du fond de la mer ou d'un lac.

Rapport de concentration
Concentration d'activité au sein d'un organisme par rapport à celle de son habitat environnant (représentée par un milieu particulier tel que l'air, les sédiments, le sol ou l'eau).

Niveau de référence dérivé pour la protection radiologique environnementale
Une bande de débit de dose dans laquelle il est probable que des effets délétères des rayonnements ionisants se produisent sur des individus de ce type d'animal ou de plante de référence (dérivé d'une connaissance des effets biologiques attendus définis pour ce type d'organisme) qui, lorsqu'il est considéré avec d'autres informations pertinentes, peut être utilisé comme point de référence pour optimiser le niveau d'effort consacré à la protection de l'environnement, en fonction des objectifs de gestion globaux et de la situation d'exposition pertinente.

Facteur de dose
Valeur qui permet de calculer la dose reçue par un organisme en supposant une distribution uniforme d'un radionucléide à l'intérieur ou à l'extérieur d'un organisme, en supposant une dosimétrie simplifiée, en termes de (mGy jour-1)/(Bq kg-1).

Situation d'exposition d'urgence
Les situations d'exposition d'urgence sont des situations d'exposition résultant d'une perte de contrôle d'une source planifiée ou de toute situation inattendue (par exemple un acte malveillant) qui nécessite une action urgente pour éviter ou réduire les conséquences indésirables.

Expositions environnementales
Toutes les expositions aux rayonnements des biotes dans l'environnement naturel, en plus des expositions naturelles résultant des activités humaines. (Ce terme a également été utilisé dans des documents antérieurs de la CIPR pour désigner les expositions humaines par des voies environnementales.)

Radioprotection environnementale
Mesures prises pour prévenir ou réduire la fréquence des effets nocifs des rayonnements sur les animaux et les plantes (biotes) dans leur environnement naturel à un niveau où ils auraient un impact négligeable sur le maintien de la diversité biologique, la conservation des espèces ou la santé et l'état des habitats, communautés et écosystèmes naturels.

Situation d'exposition existante
Les situations d'exposition existantes sont des situations d'exposition résultant de sources qui existent déjà lorsqu'une décision de les contrôler est prise (y compris les rayonnements naturels, les activités passées ou à la suite d’une situation d'urgence).

Situation d'exposition
Une situation d'exposition est un processus qui comprend une source de rayonnement naturelle ou artificielle, le transfert de rayonnement par diverses voies et l'exposition d'individus.

Gray (Gy)
Nom spécial de l'unité SI de dose absorbée : 1 Gy = 1 J. kg-1

Itéropare
Se reproduire plus d'une fois dans sa vie.

Justification
Le processus de détermination de la question de savoir si (1) une activité planifiée impliquant des rayonnements est globalement bénéfique [c'est-à-dire si les avantages pour les individus et la société de l'introduction ou de la poursuite de l'activité l'emportent sur le préjudice (y compris le préjudice dû aux rayonnements) résultant de l'activité] ; ou (2) si une stratégie de protection proposée dans une situation d'urgence ou d'exposition existante est susceptible, globalement, d'être bénéfique [c'est-à-dire si les avantages pour les individus et la société (y compris la réduction du préjudice dû aux rayonnements) de l'introduction ou de la poursuite de la stratégie de protection l'emportent sur le coût et tout préjudice ou dommage qu'elle cause].

Environnement naturel
Terme collectif désignant l'ensemble des conditions physiques, chimiques et biologiques dans lesquelles vivent normalement les animaux et les plantes sauvages.

Optimisation de la protection (et de la sécurité)
Processus de détermination du niveau de protection et de sécurité qui rend les expositions, ainsi que la probabilité et l'ampleur des expositions potentielles, aussi faibles que raisonnablement possible, compte tenu des facteurs économiques et sociétaux.

Pélagique
Relatif à la faune et à la flore qui vivent près de la surface de la mer ou d'un lac.

Situations d'exposition planifiées
Les situations d'exposition planifiées sont des situations d'exposition résultant de l'utilisation de sources introduites délibérément. Les situations d'exposition planifiées peuvent donner lieu à des expositions prévues (expositions normales) et à des expositions non prévues.

Matière radioactive
Matière désignée par la législation nationale ou par un organisme réglementaire comme étant soumise à un contrôle réglementaire en raison de sa radioactivité, prenant souvent en compte à la fois l'activité et la concentration d'activité.

Animal ou plante de référence
Entité hypothétique présentant les caractéristiques biologiques de base supposées d'un type particulier d'animal ou de plante, tel qu'il est décrit au niveau taxonomique de la famille, avec des propriétés anatomiques, physiologiques et d'histoire de vie définies, qui peut être utilisée pour établir une relation entre l'exposition et la dose, et entre la dose et les effets, pour ce type d'organisme vivant.

Organisme représentatif
Une espèce ou un groupe particulier d'organismes sélectionnés au cours d'une évaluation spécifique à un site, en tenant compte de leur emplacement supposé par rapport à la source. Dans de nombreux cas, les organismes représentatifs choisis à cette fin peuvent être identiques ou très similaires aux animaux et plantes de référence ; toutefois, dans certains cas, ils peuvent être très différents.

Séméllaire
Se reproduit une seule fois au cours de sa vie.

Source
Toute entité physique ou procédure qui entraîne une dose de rayonnement potentiellement quantifiable (généralement par rapport à une personne ou à un groupe de personnes).

 

Publication 124 de la CIPR: Protection de l’environnement dans différentes situations d’exposition
Résumé

Dans ce rapport, la Commission décrit son cadre de protection de l’environnement et la manière dont il devrait être appliqué au sein du système de protection de la Commission. Le rapport développe ses objectifs en matière de protection de l’environnement, dans la mesure où ils concernent la protection des animaux et des plantes (biotes) dans leur environnement naturel, et comment ces objectifs peuvent être atteints par: l’utilisation d’animaux et de plantes de référence (RAP); leurs niveaux de référence dérivés pour la protection radiologique environnementale (DCRL), qui relient les effets des rayonnements aux doses supérieures à leurs niveaux de rayonnement de bruit de fond naturel normal; et différentes voies d’exposition potentielles. Le rapport explique: les différents types de situations d’exposition auxquels s’appliquent ses recommandations; les principes clés qui sont pertinents pour la protection de l’environnement; et comment les valeurs de référence basées sur l’utilisation de DCRL peuvent être utilisées pour informer sur le niveau d’effort approprié en fonction des différentes situations d’exposition. D’autres recommandations sont formulées concernant la manière dont les recommandations de la Commission peuvent être mises en œuvre pour satisfaire différents objectifs de protection de l’environnement, qui peuvent nécessiter l’utilisation d’organismes représentatifs spécifiques à un site, et comment ceux-ci peuvent être comparés aux valeurs de référence. Des informations complémentaires sont également fournies concernant, notamment, la communication avec d’autres parties intéressées et les parties prenantes. Les problèmes qui peuvent survenir en matière de conformité sont également abordés et le dernier chapitre examine les implications générales des travaux de la Commission dans ce domaine à ce jour. Les annexes A et B fournissent des informations chiffrées relatives aux RAP. L’annexe C examine les différents types de législation en matière de protection de l’environnement actuellement en vigueur en ce qui concerne les grands sites et pratiques industriels, ainsi que les différentes manières dont la faune est protégée contre les diverses menaces découlant de ces sites.

Mots clés: Rayonnement; Situations d’exposition; Protection de l’environnement; Biote

Synthèse

a) Dans le cadre général de son système de protection contre les rayonnements ionisants, la Commission a élargi son champ d’action en introduisant une nouvelle exigence, celle de la protection de l’environnement. Le présent rapport décrit le cadre de la Commission pour la protection de l’environnement et la manière dont il devrait être appliqué dans le cadre du système de protection de la Commission.

(b) Les objectifs de la Commission en matière de protection de l’environnement sont de prévenir ou de réduire la fréquence des effets nocifs des radiations sur le biote à un niveau où ils auraient un impact négligeable sur le maintien de la diversité biologique, la conservation des espèces ou la santé et l’état des habitats, communautés et écosystèmes naturels. Les paramètres biologiques les plus pertinents sont donc ceux qui pourraient conduire à des changements dans la taille ou la structure des populations. En raison de l’immense diversité du biote et de sa réaction présumée aux radiations, tout système crédible doit disposer de points de référence clés qui fournissent des pistes vérifiables reliant les éléments de base du système, ou du moins permettraient de le faire si de nouvelles données étaient disponibles et qu’il était possible de les obtenir. La Commission a donc élaboré un petit ensemble de 12 animaux et plantes de référence (RAP), ainsi que leurs bases de données pertinentes, pour quelques types d’organismes typiques des principaux environnements. Les modèles de référence ont été décrits au niveau taxonomique général de la famille, puisqu’il s'agit du niveau taxonomique le plus élevé auquel les caractéristiques biologiques d'un animal ou d'une plante pertinentes pour les effets des rayonnements peuvent être considérées comme relativement constantes. Il s'agit essentiellement de modèles de référence.

c) Des niveaux de référence dérivés pour la protection radiologique environnementale (DCRL) spécifiques à chacun des différents types de RAP ont également été définis. Un DCRL peut être considéré comme une bande de débit de dose, couvrant un ordre de grandeur, dans laquelle il existe une certaine probabilité que des effets délétères des rayonnements ionisants se produisent sur les individus de ce type de RAP. Ainsi, lorsqu'ils sont considérés conjointement avec d'autres informations pertinentes, les DCRL peuvent être utilisés comme points de référence pour informer sur le niveau approprié d'effort qui devrait être consacré à la protection de l'environnement, en fonction des objectifs de gestion globaux, de la situation d'exposition, de la faune et de la flore réellement présentes et du nombre d'individus ainsi exposés.

d) La Commission recommande donc que les DCRL soient utilisées dans toutes les circonstances où il existe ou peut exister une exposition environnementale supplémentaire significative par rapport au fond naturel local auquel est exposé le biote concerné. Dans les situations d'exposition planifiée, la limite inférieure de la bande DCRL pertinente devrait être utilisée comme point de référence approprié pour la protection de différents types de biotes dans une zone donnée lors de la planification des contrôles d'une source. En raison de la possibilité de sources multiples affectant le même biote, ou de toute exposition résiduelle résultant de sources précédentes, il convient également de prendre en compte les éventuels impacts cumulatifs.

e) Dans les situations d'exposition existantes et dans les situations d'exposition d'urgence où la maîtrise de la source n'a pas été obtenue, si les débits de dose sont supérieurs à la bande DCRL pertinente, la Commission recommande que l'objectif soit de réduire les expositions à des niveaux qui se situent dans les bandes DCRL pour les populations concernées, en tenant pleinement compte des conséquences radiologiques et non radiologiques qui en découlent. Si les débits de dose se situent à l’intérieur des bandes, la Commission estime qu'il convient d'envisager de réduire les expositions, en supposant que les coûts et les avantages soient tels que des efforts supplémentaires soient justifiés. Ainsi, dans le cas de situations d'exposition existantes, les DCRL devraient être utilisés comme critères pour atténuer les expositions environnementales.

(f) Les RAPs étant par définition des points de référence, il peut également être nécessaire d'identifier les organismes représentatifs pertinents pour chaque situation. Ceux-ci peuvent être extrêmement similaires aux RAPs ou être différents. Dans certains cas, le choix sera limité car cette sélection peut avoir été effectuée précédemment en vertu d'une autre législation existante. Néanmoins, les différences entre ces biotes et les RAPs doivent être quantifiables en ce qui concerne leur biologie de base, leur dosimétrie ou les effets des rayonnements, et ces différences doivent être notées et prises en compte. La mesure dans laquelle ces facteurs doivent être appliqués et leur impact pertinent sur la décision finale dépendront de la nature de la mise en œuvre et de l'application du processus de planification relatif à la protection de l'environnement. Comme d'autres organismes réglementaires sont susceptibles d'être impliqués, tels que ceux responsables de la gestion de la faune sauvage, il est essentiel d'établir un lien logique clairement défini entre les rejets radioactifs et le risque potentiel d'effets biologiques (pour lequel les RAPs devrait être un point de départ), et une stratégie clairement définie par laquelle les parties prenantes concernées peuvent être impliquées dans le processus de prise de décision.

g) En ce qui concerne les interventions en cas d'urgence ou de rejet accidentel de radionucléides dans l'environnement, la protection de l'environnement peut ne pas être une priorité immédiate, dans la mesure où l'exposition humaine ou la chaîne alimentaire humaine sont susceptibles d'être affectées. Cependant, même lorsque les préoccupations relatives à l'exposition humaine prédominent, il convient de tenir compte des conséquences environnementales des options possibles pour atteindre le niveau adéquat de protection de l’homme.

(h) Après la survenue d'un accident, le cadre des DCRL et l'ensemble des impacts indicatifs sur la population par rapport aux doses reçues peuvent être utiles pour communiquer les implications de la situation aux parties prenantes, notamment en ce qui concerne les conditions environnementales dans lesquelles les personnes ont été évacuées de la zone et la rupture des chaînes alimentaires conduisant à l'exposition humaine. Le concept de tels niveaux de référence pour les effets graves est souvent utilisé dans l'industrie chimique. La Commission note que ce type de niveau pourrait être considéré comme étant approximativement équivalent à une bande de doses de deux ordres de grandeur au-dessus de la bande des DCRL. Immédiatement après la survenue d’un rejet accidentel, des informations peuvent être communiquées au public sous forme d'évaluation de la situation environnementale par rapport à un point de référence prédéterminé, et ainsi les résultats des mesures de protection, ou simplement l'effet des événements naturels, peuvent être facilement évalués.

(i) Dans la mesure du possible, la protection de l'environnement contre une source doit compléter les contrôles visant à protéger le public et ne pas contribuer inutilement à la complexité de la protection. La Commission estime donc qu'après avoir clarifié les bases sur lesquelles peuvent se fonder les décisions relatives à la protection de l'environnement au moyen d'un cadre reliant l'exposition à la dose et la dose à l'effet pour différents types d'organismes (l'ensemble des RAP), la démonstration de la protection des espèces humaines et non humaines résultant de situations d'exposition normales planifiées pourrait bien être intégrée d'une manière relativement simple, en se fondant uniquement sur des estimations (au stade de la conception) et des mesures (au cours de l'exploitation) des concentrations de radionucléides dans l'environnement.

j) La mise en œuvre pratique de ces recommandations sera suivie de près par la Commission, et toute révision future sera effectuée à la lumière de cette expérience.

Glossaire

Benthique
Relatif à la faune et à la flore du fond de la mer ou d'un lac.

Rapport de concentration
Concentration d'activité au sein d'un organisme par rapport à celle de son habitat environnant (représentée par un milieu particulier tel que l'air, les sédiments, le sol ou l'eau).

Niveau de référence dérivé pour la protection radiologique environnementale
Une bande de débit de dose dans laquelle il est probable que des effets délétères des rayonnements ionisants se produisent sur des individus de ce type d'animal ou de plante de référence (dérivé d'une connaissance des effets biologiques attendus définis pour ce type d'organisme) qui, lorsqu'il est considéré avec d'autres informations pertinentes, peut être utilisé comme point de référence pour optimiser le niveau d'effort consacré à la protection de l'environnement, en fonction des objectifs de gestion globaux et de la situation d'exposition pertinente.

Facteur de dose
Valeur qui permet de calculer la dose reçue par un organisme en supposant une distribution uniforme d'un radionucléide à l'intérieur ou à l'extérieur d'un organisme, en supposant une dosimétrie simplifiée, en termes de (mGy jour-1)/(Bq kg-1).

Situation d'exposition d'urgence
Les situations d'exposition d'urgence sont des situations d'exposition résultant d'une perte de contrôle d'une source planifiée ou de toute situation inattendue (par exemple un acte malveillant) qui nécessite une action urgente pour éviter ou réduire les conséquences indésirables.

Expositions environnementales
Toutes les expositions aux rayonnements des biotes dans l'environnement naturel, en plus des expositions naturelles résultant des activités humaines. (Ce terme a également été utilisé dans des documents antérieurs de la CIPR pour désigner les expositions humaines par des voies environnementales.)

Radioprotection environnementale
Mesures prises pour prévenir ou réduire la fréquence des effets nocifs des rayonnements sur les animaux et les plantes (biotes) dans leur environnement naturel à un niveau où ils auraient un impact négligeable sur le maintien de la diversité biologique, la conservation des espèces ou la santé et l'état des habitats, communautés et écosystèmes naturels.

Situation d'exposition existante
Les situations d'exposition existantes sont des situations d'exposition résultant de sources qui existent déjà lorsqu'une décision de les contrôler est prise (y compris les rayonnements naturels, les activités passées ou à la suite d’une situation d'urgence).

Situation d'exposition
Une situation d'exposition est un processus qui comprend une source de rayonnement naturelle ou artificielle, le transfert de rayonnement par diverses voies et l'exposition d'individus.

Gray (Gy)
Nom spécial de l'unité SI de dose absorbée : 1 Gy = 1 J. kg-1

Itéropare
Se reproduire plus d'une fois dans sa vie.

Justification
Le processus de détermination de la question de savoir si (1) une activité planifiée impliquant des rayonnements est globalement bénéfique [c'est-à-dire si les avantages pour les individus et la société de l'introduction ou de la poursuite de l'activité l'emportent sur le préjudice (y compris le préjudice dû aux rayonnements) résultant de l'activité] ; ou (2) si une stratégie de protection proposée dans une situation d'urgence ou d'exposition existante est susceptible, globalement, d'être bénéfique [c'est-à-dire si les avantages pour les individus et la société (y compris la réduction du préjudice dû aux rayonnements) de l'introduction ou de la poursuite de la stratégie de protection l'emportent sur le coût et tout préjudice ou dommage qu'elle cause].

Environnement naturel
Terme collectif désignant l'ensemble des conditions physiques, chimiques et biologiques dans lesquelles vivent normalement les animaux et les plantes sauvages.

Optimisation de la protection (et de la sécurité)
Processus de détermination du niveau de protection et de sécurité qui rend les expositions, ainsi que la probabilité et l'ampleur des expositions potentielles, aussi faibles que raisonnablement possible, compte tenu des facteurs économiques et sociétaux.

Pélagique
Relatif à la faune et à la flore qui vivent près de la surface de la mer ou d'un lac.

Situations d'exposition planifiées
Les situations d'exposition planifiées sont des situations d'exposition résultant de l'utilisation de sources introduites délibérément. Les situations d'exposition planifiées peuvent donner lieu à des expositions prévues (expositions normales) et à des expositions non prévues.

Matière radioactive
Matière désignée par la législation nationale ou par un organisme réglementaire comme étant soumise à un contrôle réglementaire en raison de sa radioactivité, prenant souvent en compte à la fois l'activité et la concentration d'activité.

Animal ou plante de référence
Entité hypothétique présentant les caractéristiques biologiques de base supposées d'un type particulier d'animal ou de plante, tel qu'il est décrit au niveau taxonomique de la famille, avec des propriétés anatomiques, physiologiques et d'histoire de vie définies, qui peut être utilisée pour établir une relation entre l'exposition et la dose, et entre la dose et les effets, pour ce type d'organisme vivant.

Organisme représentatif
Une espèce ou un groupe particulier d'organismes sélectionnés au cours d'une évaluation spécifique à un site, en tenant compte de leur emplacement supposé par rapport à la source. Dans de nombreux cas, les organismes représentatifs choisis à cette fin peuvent être identiques ou très similaires aux animaux et plantes de référence ; toutefois, dans certains cas, ils peuvent être très différents.

Séméllaire
Se reproduit une seule fois au cours de sa vie.

Source
Toute entité physique ou procédure qui entraîne une dose de rayonnement potentiellement quantifiable (généralement par rapport à une personne ou à un groupe de personnes).

 

Publication 126 de la CIPR: Protection radiologique contre l'exposition au radon
Résumé

Dans ce rapport la Commision émet des recommandations actualisées sur la protection radiologique contre l’exposition au radon. Le rapport a été élaboré en tenant compte des dernières recommandations de la CIPR concernant le système de protection radiologique, de toutes les connaissances scientifiques disponibles en matière de risques associés à l’exposition au radon et de l’expérience acquise par de nombreux pays et organisations quant à la maîtrise de cette exposition. Le rapport décrit les caractéristiques de l’exposition au radon, dont les sources et les mécanismes de transfert, les riques pour la santé qui y sont associés ainsi que les défis liés à la gestion de cette exposition. La Commission recommande d’adopter une approche intégrée pour la maîtrise de l’exposition au radon reposant autent que possible sur la gestion des bâtiment. Cette approche est fondée sur le principe d’optimisation et est  graduée en fonction des responsabilitiés des principales parties prenantes, notamment sur les lieux de travail, et de l’intention des autorités nationales de maîtriser l’exposition au radon. Le rapport émet également des recommandations relatives à la gestion de l’exposition au radon lorsque des travailleurs sont considérés comme professionellement exposés aux rayonnements et que les exigences appropriées de la Commission devraient être appliquées.

Mots clés: exposition au radon; prévention; réduction; habitations; bâtiments; lieux de travail

Synthèse
  1. L’objectif de ce rapport est de décrire et clarifier l’application du système de la Commission pour la protection du public et des travailleurs contre les expositions au radon dans les habitations, sur les lieux de travail et dances d’autres types de lieux.
  2. Le radon a deux isotopes principaux. Le radon 222 est un descendant radioactif du radium 226 et est présent dans la croute terrestre à des concentrations variables. Comme le radon est un gaz il peut circuler du sol vers l'intérieur des bâtiments. Cette propagation dépend de différents facteurs, tels que le type de sol, du bâtiment ou de la localisation. Le radon 220 est un descendant radioactif du radium 224 dans la chaîne de désintégration du thorium 232 également présent dans la croûte terrestre. Le radon 222 et le radon 220 peuvent également émaner de matériaux de construction et diffuser dans l'atmosphère intérieure. La concentration de radon dans l'air intérieur peut varier de plusieurs ordres de grandeur d'un bâtiment à un autre. Le présent rapport se concentre sur le radon 222.
  3. Le radon peut être inhalé. Dans la mesure où il est inerte, la quasi-totalité du gaz inhalé est ensuite exhalée. Toutefois, les descendants à vie courte du radon liés aux aérosols ambiants peuvent, une fois inhalés, se déposer dans les voies respiratoires. Selon les propriétés de diffusion de l'aérosol, les descendants présents dans l'air se déposent dans les cavités nasales, sur les parois des bronches et dans les poumons. Deux de ces descendants à vie courte, le polonium 218 et le polonium 214, émettent des particules alpha; l'énergie déposée par ces dernières représente la principale contribution à l'exposition aux rayonnements ionisants pouvant entraîner des effets sur la santé.
  4. Dans la Publication 115 (ICRP, 2010), la Commission a passé en revue et analysé des études épidémiologiques sur le lien entre le cancer du poumon et les expositions au radon. Dans le cas des mines souterraines et des habitations, il existe des preuves solides selon lesquelles l'exposition au radon et à ses descendants peut provoquer des cancers du poumon. Par conséquent, la Commission a recommandé, à des fins de protection radiologique, un coefficient de risque nominal ajusté au détriment pour le cancer du poumon chez une population adulte mixte de fumeurs et de non-fumeurs de 8 x 10-10 par Bq.h.m-3 pour l'exposition au gaz radon 222 en équilibre avec ses descendants [5 x 10-4 par WLM (working level month en anglais, que l'on peut traduire par niveau mensuel d'exposition professionnelle)]. Cette valeur équivaut approximativement au double de celle utilisée par la Commission dans la Publication 65 (ICRP, 1993). Pour les tumeurs solides autres que le cancer du poumon et pour la leucémie, il n'existe à ce jour aucunes données concordantes prouvant une incidence accrue associée à l'exposition au radon et à ses descendants.
  5. Dans le cadre du système de protection radiologique, l'exposition au radon présente les caracteristiques d'une situation d'exposition existante, car la source est constituée de concentrations non modifiées de l'activiteé primordiale d'origine naturelle omniprésente dans la croûte terrestre (ICRP, 2007). Les activités humaines, telles que la construction de bâtiments ou l'exploitation de mines, peuvent créer ou modifier des mécanismes qui augmentent l'exposition au radon et à ses descendants. Ces mécanismes de propagation du radon peuvent être maîtrisés par la mise en place d'actions de prévention et de réduction. Cependant, la source elle-même ne peut pas être modifiée et, par conséquent, existe déjà lorsqu'une décision doit être prise pour la maîtriser. Sur certains lieux de travail toutefois, la situation d'exposition au radon peut être considérée d'emblée par les autorités nationales comme une situation d'exposition planifiée. De tels lieux de travail incluent les mines d'uranium associées au cycle du combustible nucléaire.
  6. II est peu probable que l'exposition au radon engendre une situation d'exposition d'urgence. Néanmoins, la mesure de concentrations localement très élevées pourrait nécessiter la mise en oeuvre rapide de mesures de protection.
  7. Le postulat de la Publication 103 (ICRP, 2007), comparé à celui de la Publication 60 (ICRP, 1991 ), est de recommander une approche cohérente pour la gestion de tous les types de situations d'expositlon. Cette approche s'appuie sur l'application du principe d'optimisation dont la mise en oeuvre implique l'utilisation de restrictions pertinentes concernant les doses individuelles: contraintes de doses ou niveaux de référence. L’optimisation consiste à s'efforcer de réduire les doses à un niveau aussi bas que raisonnablement possible au-dessous de ces contraintes au niveaux de référence, quel que soil le niveau d'exposition initial.
  8. La vie quotidienne, que ce soit à la maison au au travail, entraîne inévitablement une certaine exposition au radon. À l'instar de nombreuses autres situations d'exposition existantes, les expositions au radon peuvent s'avérer très hétérogènes. Le niveau d'exposition dépend fortement du comportement individuel. Le rôle des mesures d'autoprotection est donc crucial. La caractérisation de la situation d'exposition est une condition préalable à sa maîtrise. La gestion de l'exposition domestique au radon devrait couvrir plusieurs aspects (environnement, santé, économie, architecture et education, par exemple) et impliquer un large éventail de parties prenantes.
  9. La maîtrise de l'exposition au radon dans les espaces intérieurs présente de nombreux défis. Dans la mesure où les individus se déplacent d'un endroit à un autre dans un même territoire, une stratégie de protection contre l'exposition au radon devrait être élaborée par les autorités nationales et mise en oeuvre de façon cohérente et intégrée dans les différents lieux. Étant donné que l'essentiel de l'exposition au radon survient à l'intérieur des habitations, une stratégie de protection centre l'exposition au radon devrait aborder la question de l'exposition domestique dans une perspective de santé publique. Dans de nombreux bâtiments, le niveau de radon peut être bien supérieur à la concentration dont il a été demontré qu'elle représentait des risques potentiels pour la santé et il est alors nécessaire d'engager des actions de réduction de l'exposition globale de l'ensemble de la population ainsi que des expositions individuelles les plus élevées. La stratégie devrait être simple, adaptée aux autres risques sanitaires, soutenue et mise en oeuvre à long terme et impliquer toutes les parties prenantes.
  10. La stratégie nationale de protection contre l'exposition au radon doit également aborder ces défis en termes de responsabilités, notamment celle du détenteur d'un logement envers les autres occupants, du constructeur ou du vendeur d'un bien immobilier envers l'acheteur, du propriétaire envers le locataire, de l'employeur envers l'employé et, de manière plus générale, du responsable de tout bâtiment envers ses occupants. Tous ces facteurs ont un impact sur la capacité de mise en oeuvre de la stratégie de protection contre l'exposition au radon.
  11. La diversité des responsabilités renforce la nécessité d'une stratégie réaliste et efficace en matière de protection contre l'exposition au radon. Toute stratégie de protection contre l'exposition au radon devrait avoir pour but de maintenir ou de réduire les concentrations de radon à un niveau aussi bas que raisonnablement possible, tout en gardant à l'esprit qu'il n'est pas possible d'éliminer complètement le radon dans l'air intérieur.
  12. La Commission considère que, dans la plupart des situations, une stratégie nationale de protection contre l'exposition au radon est justifiée car le radon est omniprésent, qu'il constitue une source significative d'exposition aux rayonnements, qu'il représente la deuxième cause de cancer du poumon après le tabagisme et que, dans la plupart des cas, il peut être maîtrisé. Une stratégie de protection contre l'exposition au radon peut également avoir des retombées positives sur d'autres politiques de santé publique, telles que la lutte contre le tabagisme et l'amélioration de la qualité de l'air intérieur. La caractérisation de la situation, y compris l'évaluation des concentrations de radon et l'identification des zones exposées au radon, ainsi que la prise en compte des priorités en matière de santé publique et des facteurs socio-économiques, sont nécessaires pour que les autorités nationales formulent et mettent en oeuvre une stratégie de protection contre l'exposition au radon. Bien que le risque absolu de cancer du poumon découlant de l'exposition au radon soit significativement plus élevé chez les fumeurs que chez les non-fumeurs, les recommandations de la Commission pour la protection contre l'exposition au radon sont identiques pour ces deux catégories de population.
  13. La caractérisation de la situation d'exposition est également une condition préalable à l'application du principe d'optimisation. Ce principe encourage la maîtrise de l'exposition au radon dans le but de maintenir ou de réduire l'exposition à un niveau aussi bas que raisonnablement possible, tout en tenant compte des circonstances économiques et sociétales qui prévalent. Comme pour la maîtrise des autres sources de rayonnements, la Commission recommande l'utilisation de restrictions des doses individuelles relatives à la source, en conjonction avec l'optimisation de la protection
  14. Il incombe aux autorités nationales compétentes, comme pour les autres sources de rayonnements, d'établir leurs propres niveaux de référence nationaux en dose et le niveau de référence opérationnel en concentration, et d'appliquer dans leur pays le processus d'optimisation de la protection. L’objectif consiste à réduire à la fois le risque global pour l'ensemble de la population et, par souci d'équité, le risque individuel pour les personnes les plus exposées. Dans les deux cas, le processus est mis en oeuvre à travers la gestion des bâtiments plutôt que par celle des expositions individuelles. Cette démarche devrait aboutir à des niveaux de concentration de radon dans l'air ambiant intérieur aussi faibles que raisonnablement possible en dessous du niveau de référence national.
  15. L’exposition au radon ne peut être maîtrisée qu'en agissant sur les voies d'exposition. Une telle approche est bénéfique pour les individus et un soutien leur est fourni afin de réduire les doses auxquelles ils sont exposés. Compte tenu de ces considérations, le niveau de référence approprié devrait correspondre à une dose annuelle comprise entre 1 et 20 mSv, comme le recommande la Commission pour les situations d'exposition existantes (ICRP, 2007, tableau 5). La Commission considère qu'une valeur de l'ordre de 10 mSv, comme indiqué dans la Publication 65 (ICRP, 1993), devrait rester la valeur repère pour fixer un niveau de référence pour l'exposition au radon.
  16. Étant donné que la plupart des moyens mis en oeuvre pour maîtriser l'exposition au radon sont appliqués aux bâtiments, il convient d'établir des niveaux de référence opérationnels pour le radon en termes de concentration dans l'air, laquelle est une quantité mesurable exprimée en becquerels par mètre cube (Bq.m-3). Dans la Publication 103 (ICRP, 2007), la Commission a recommandé, pour les niveaux de référence opérationnels, des valeurs maximales de 600 Bq.m-3 dans les habitations et de 1 500 Bq.m-3 sur les lieux de travail. Après l'examen de l'épidémiologie du radon dans sa Publication 115 (ICRP, 2010) et l'augmentation du coefficient de risque nominal d'un facteur 2 environ, la Commission a réduit le niveau de référence maximal à 300 Bq.m-3 pour les habitations dans sa Déclaration sur le radon qui y est associée. Une concentration de radon de 300 Bq.m-3 dans les habitations correspond à une dose annuelle d'environ 10 mSv selon la convention de conversion en dose et sur la base du coefficient de risque nominal révisé (ICRP, 2010). La Déclaration sur le radon fait également référence à un niveau de 1 000 Bq.m-3 comme seuil pour l'application des exigences en matière de protection radiologique professionnelle, en remplacement de l'ancien niveau de référence maximal établit à 1 500 Bq.m-3.
  17. Dans sa Déclaration sur le radon, la Commission a également fait part de son intention de publier des coefficients de dose pour l'incorporation du radon et de ses descendants, calculés à l'aide de modèles biocinétiques et dosimétriques de référence. Sur la base des nouveaux coefficients de dose, une valeur de 300 Bq.m-3 équivaut à une dose annuelle dans les habitations plus élevée mais qui reste comprise dans l'intervalle de 1 à 20 mSv.
  18. Pou r la mise en ceuvre pratique d'une strategie de protection contre !'exposition au radon, la Commission continue de recommander une valeur maximale du niveau de reference operationnel de 300 Bq.m·'pour le radon 222, dans les habitations. La Commission encourage vivement les autorites nationales a etablir un niveau de reference opE!rationnel national qui soit aussi bas que raisonnablement possible dans un intervalle de 100 a 300 Bq.m·3, en tenant compte des circonstances economiques et socletales qui prevalent. Cette demarche est conforme a la Declaration de la CIPR sur le radon (ICRP, 2010) et au manuel de !'Organisation mondiale de la sante (OMS) sur le radon dans l'air lnterieur, intitule WHO Handbook on Indoor Radon (WHO, 2009). Pour evaluer la conformite au niveau de reference operatlonnel, les mesures de concentration du radon doivent etre representatives de la concentration moyenne annuelle dans un batiment ou un lieu donne
  19. Par souci de simplification, considerant que les individus se depla9ant quotidiennement dans un meme territoire devraient etre proteges egalement partout ou ils se rendent, la Commission recommande de fixer la meme valeur maximale de 300 Bq.m·' pour les batiments a vocation mixte qui sont utilises aussi bien par des membres du public que par des travailleurs
  20. La Commission recommande desormais d'adopter une approche graduee pour la maitrise des expositions au radon. Dans le cadre d'une telle demarche, la strategie de protection centre !'exposition au radon devrait commencer par un programme visant a encourager les decideurs politiques concernes a promouvoir des mesures d'autoprotection, telles que la mesure de la concentration du radon et, s necessaire, la mise en place d'actions correctives. Ce processus peut etre mis en oouvre par le biais d'informations, de recommandations, d'assistance et, si necessaire, d'exigences plus formelles. Le recours El et le niveau demise en CEuvre de ces diverses actions devraient dependre du degre de responsabilite juridique associe a la situation et de !'ambition de la strategle nationale de protection centre !'exposition au radon
  21. Une approche graduee speciflque devrait etre mise en oouvre pour les lieux de travail, afln de remplacer le seuil de 1 000 Bq.m·3 a partir duquel les exigences en matiere de protection professionnelle s'appliquent. Dans les locaux ou !'exposition des travailleurs au radon n'est pas consideree comme professionnelle (les espaces de bureaux par exemple), la premiere E!tape consiste a rE!duire la concentration de radon a un niveau aussi bas que raisonnablement possible, en dessous du mem nlveau de reference operationnel que celui flxe pour les habitations. La dose annuelle correspondante y est en principe inferieure a celle dans les habitations car le temps passe sur le lieu de travail est generalement moindre que celui passe a domicile. Si la premiere etape presente des difficultes, une approche plus realiste est recommandee dans un deuxieme temps, consistant a optimiser la protection en utilisant les para metres reels de la situation d'exposition, tels que le taux d'occupation du biitiment ainsi qu'un niveau de reference de l'ordre de 1 0 mSv pour la dose annuelle
  22. Si malgre tousles efforts raisonnablement entrepris pour reduire !'exposition au radon sur les lieux de travail !'exposition reste superieure au niveau de reference exprime en dose, les travailleurs devraient etre consideres com me professionnellement exposes. Dans ce cas, la Commission recommande d'appliquer les exigences adequates en matiere d'exposition professionnelle (ICRP, 2007, section 5.4.1 ).
  23. La Commission recommande egalement d'appliquer les memes exigences sur les lieux de travail oll !'exposition des travail/eurs au radon est considE!ree d'emblee comme professionnelle, par les autorites nationales. Ces lieux de travail peuvent inclure les stations thermales, les grottes et d'autres lieux de travail souterrains
  24. Que les travailleurs soient ou non consideres comme professionnellement exposes, leur exposition devralt etre maintenue en dessous de la valeur maximale de l'intervalle applicable aux situations d'exposition existantes soil 20 mSv.an·1• La limite de dose professionnelle devrait s'appliquer lorsque les autorites nationales estiment que la situation d'exposltion au radon devrait etre geree comme une situation d'exposition planifiee
Points principaux
  • Les personnes sont exposées au radon à leur domicile, sur leur lieu de travail et dans les bâtiments à usage mixte. La variabilité des concentrations de radon dans l’air intérieur entraîne une répartition très hétérogène des expositions. L’exposition au radon à l’extérieur ne pose généralement pas de problème.
  • Il existe des preuves solides selon lesquelles l’exposition au radon et à ses descendants peut provoquer des cancers du poumon. Cette exposition est la deuxième cause de cancer du poumon après le tabagisme.
  • L’exposition au radon est une situation d’exposition existante, car la source est constituée de concentrations non modifiées de l’activité primordiale d’origine naturelle omniprésente dans la croûte terrestre. Seules les voies d’exposition peuvent être maîtrisées.
  • Les autorités nationales devraient caractériser la situation d’exposition et élaborer une stratégie nationale de protection contre l’exposition au radon. Étant donné qu’une grande partie de cette exposition a lieu à domicile, cette stratégie devrait considérer l’exposition dans les habitations comme un enjeu de santé publique et engager à réduire l’exposition globale de la population générale ainsi que les expositions individuelles les plus élevées.
  • La stratégie devrait être simple et réaliste, intégrée, afin d’être cohérente pour tous les bâtiments, graduée en fonction de la situation et des responsabilités et ne pas faire de distinction entre les fumeurs et les non-fumeurs. Elle devrait être envisagée en lien avec d’autres politiques de santé publique, telles que sur les performances énergétiques, la lutte antitabac et l’amélioration de la qualité de l’air intérieur.
  • La stratégie de protection contre l’exposition au radon devrait inclure des actions de prévention pour les nouveaux bâtiments et des actions de réduction pour les bâtiments existants.
  • La gestion de l’exposition au radon repose principalement sur l’application du principe d’optimisation et l’utilisation d’un niveau de référence approprié. Ce niveau devrait correspondre à une dose annuelle comprise entre 1 et 20 mSv, comme le recommande la Commission. La Commission considère qu’une dose annuelle de l’ordre de 10 mSv devrait rester la valeur repère servant à déterminer un niveau de référence pour l’exposition au radon.
  • Pour la mise en œuvre pratique de la stratégie de protection contre l’exposition au radon, la valeur maximale du niveau de référence opérationnel recommandée par la Commission dans les habitations, représentative de la concentration moyenne annuelle, reste de 300 Bq.m-3. La même valeur est recommandée pour tous les autres bâtiments et lieux de travail.
  • La Commission encourage vivement les autorités nationales à établir un niveau de référence opérationnel national qui soit aussi bas que raisonnablement possible dans l’intervalle de 100 à 300 Bq.m-3, en tenant compte des circonstances économiques et sociétales qui prévalent.
  • Dans la plupart des lieux de travail, les expositions des travailleurs au radon sont fortuites et ces derniers ne sont donc pas considérés comme professionnellement exposés. La Commission recommande une approche graduée spécifique sur les lieux de travail, qui respecte les étapes suivantes :
    • optimiser la protection en utilisant le niveau de référence opérationnel commun pour tous les bâtiments et lieux de travail ;
    • optimiser la protection en utilisant les paramètres réels de la situation d’exposition, tels que le taux d’occupation du bâtiment et un niveau de référence de 10 mSv pour la dose annuelle ; et
    • appliquer les exigences pertinentes en matière d’exposition professionnelle si, malgré tous les efforts raisonnablement entrepris, l’exposition reste supérieure au niveau de référence.
  • Les exigences pertinentes en matière d’exposition professionnelle s’appliquent aux lieux de travail où, dès le départ, les travailleurs sont considérés comme professionnellement exposés au radon par les autorités nationales.
  • La limite de dose professionnelle devrait s’appliquer lorsque les autorités nationales estiment que la situation d’exposition au radon devrait être gérée comme une situation d’exposition planifiée.
Glossaire

Catégories d’exposition
La Commission distingue trois catégories d’exposition aux rayonnements : l’exposition médicale, l’exposition professionnelle et l’exposition du public.

Niveau de référence opérationnel
Valeur numérique exprimée sous la forme d’une quantité opérationnelle ou mesurable, correspondant au niveau de référence défini en termes de dose.

Employeur
Organisation, personne morale, partenariat, firme, association, trust, domaine, institution publique ou privée, groupe, entité politique ou administrative ou toute autre personne désignée conformément à la législation nationale, qui a une responsabilité, un engagement et des devoirs reconnus envers un travailleur lié à elle ou lui par une relation de travail mutuellement convenue. Un travailleur indépendant est considéré comme étant à la fois un employeur et un travailleur.

Concentration équivalente à l’équilibre
Concentration de l’activité du gaz radon, en équilibre avec ses descendants à vie courte, qui aurait la même concentration en énergie alpha potentielle que le mélange hors équilibre existant.

Facteur d’équilibre
Rapport entre la concentration équivalente à l’équilibre et la concentration du gaz radon. En d’autres termes, le rapport entre la concentration de l’énergie alpha potentielle pour le mélange réel de descendants du radon et celle qui s’appliquerait en équilibre radioactif.

Situation d’exposition existante
Situation causée par une source qui existe déjà lorsqu’une décision doit être prise quant à sa maîtrise ; il s’agit notamment des rayonnements d’origine naturelle, des zones contaminées à long terme après un accident nucléaire ou une situation d’urgence radiologique et des résidus issus de pratiques antérieures non conformes aux recommandations de la Commission.

Voie d’exposition
Chemin par lequel les rayonnements ou les radionucléides peuvent atteindre les êtres humains et les exposer.

Approche graduée
Pour un système de contrôle, tel qu’un système national ou un système de sûreté, il s’agit d’un processus ou d’une méthode selon lequel/laquelle la rigueur des mesures de contrôle et des conditions à appliquer est proportionnelle, dans la mesure du possible, à la probabilité et aux conséquences possibles d’une perte de contrôle, ainsi qu’au niveau de risque associé à cette perte.

Exposition médicale
Exposition encourue par les patients à des fins diagnostiques ou thérapeutiques dans le domaine médical ou dentaire par des personnes autres que celles exposées professionnellement, qui, en connaissance de cause, aident à soutenir et à réconforter des patients et par des volontaires participant à des projets de recherche biomédicale.

Membre du public
Toute personne soumise à une exposition qui n’est ni professionnelle ni médicale.

Enquête nationale sur le radon
Enquête menée afin de déterminer la distribution des concentrations de radon représentative de l’exposition au radon de la population d’un pays.

Matériau naturellement radioactif
Matériau radioactif ne contenant pas de quantités significatives de radionucléides autres que les radionucléides naturels. Les matériaux dans lesquels les concentrations des radionucléides naturels ont été modifiées par certains procédés sont inclus.

Exposition professionnelle
Toutes les expositions de travailleurs survenues sur le lieu de travail à la suite de situations qui peuvent raisonnablement être considérées comme relevant de la responsabilité de la direction opérationnelle.

Direction opérationnelle
Personne ou groupe de personnes qui dirige, contrôle et évalue une organisation au niveau le plus élevé. De nombreux termes différents sont utilisés, notamment président-directeur général, directeur général, directeur exécutif et groupe exécutif.1

Optimisation de la protection
Processus consistant à déterminer quel niveau de protection rend les expositions, ainsi que la probabilité et l’ampleur des expositions potentielles, aussi faibles que raisonnablement possible, en tenant compte des facteurs économiques et sociétaux.

Situations d’exposition planifiées
Situations qui impliquent l’introduction et l’exploitation délibérée de sources. Les situations d’exposition planifiées peuvent donner lieu à des expositions dont la survenue est anticipée (expositions normales) et à des expositions dont la survenue est incertaine (expositions potentielles).

Concentration d’énergie alpha potentielle
Concentration dans l’air des descendants à vie courte du radon 222 ou du radon 220, en termes d’énergie alpha émise durant la désintégration complète des descendants du radon 222 en plomb 210 ou des descendants du radon 220 en plomb 208, et de tout mélange de radon 222 ou de radon 220 à vie courte dans une unité de volume d’air. L’unité SI pour la concentration d’énergie alpha potentielle est le J.m-3.

Exposition du public
Exposition aux sources de rayonnement encourue par des membres du public, autre que des expositions professionnelles et médicales.

Descendants du radon 220
Produits de désintégration du radon 220. Dans ce rapport, l’expression est utilisée dans un sens plus restreint désignant les produits de désintégration à vie courte du polonium 216 au polonium 212 ou au thallium 208.

Descendants du radon 222
Produits de désintégration du radon 222. Dans ce rapport, l’expression est utilisée dans un sens plus restreint désignant les produits de désintégration à vie courte du polonium 218 au polonium 214. Les descendants du radon sont parfois appelés « produits de désintégration du radon » ou plus classiquement « produits de filiation du radon ».

Zone exposée au radon
Zone géographique ou région administrative délimitée sur la base d’enquêtes indiquant une concentration de radon significativement plus élevée que dans d’autres parties du pays.

Niveau de référence
Dans les situations d’exposition existantes, il s’agit du niveau de dose ou de risque au-dessus duquel il est jugé inapproprié de permettre que des expositions se produisent et en dessous duquel l’optimisation de la protection devrait être mise en œuvre. La valeur choisie comme niveau de référence dépendra des circonstances associées à l’exposition considérée.

Risque
Risque lié à la probabilité qu’un effet (un cancer du poumon par exemple) se produise. Les termes relatifs au risque sont regroupés ci-après.

  • Risque relatif
    • Rapport entre le taux d’incidence ou le taux de mortalité pour la maladie considérée (c’est-à-dire le cancer du poumon) dans une population exposée et non exposée.
  • Excès de risque relatif
    • Risque relatif - 1.
  • Coefficient de risque
    • Augmentation du risque par unité d’exposition ou par unité de dose. En général, elle est exprimée en tant qu’excès de risque relatif par WLM, par J.h.m-3, par incrément de 100 Bq.m-3 ou par Sv.
  • Détriment
    • Le détriment est un concept de la CIPR. Il reflète l’ensemble du préjudice sanitaire subi par un groupe exposé et ses descendants du fait de l’exposition du groupe à une source de rayonnements. Le détriment est un concept multidimensionnel. Ses principales composantes sont des quantités stochastiques : la probabilité de cancer mortel attribuable, la probabilité pondérée de cancer non mortel attribuable, la probabilité pondérée d’effets héréditaires graves et la durée de vie perdue si le préjudice se produit.

Travailleur
Toute personne qui est employée à temps plein, à temps partiel ou temporairement par un employeur et à qui sont reconnus des droits et des devoirs en lien avec son emploi.

Niveau d’exposition professionnelle
Unité historique de la concentration d’énergie alpha potentielle. Ce niveau est défini comme toute combinaison de descendants à vie courte du radon dans 1 m3 d’air entraînant l’émission de 1,30 x 108 MeV.m-3 d’énergie alpha potentielle, soit approximativement 2,08 x 10-5 J.m-3.

Niveau mensuel d’exposition professionnelle (WLM)
Exposition cumulée due à l’inhalation d’une atmosphère à une concentration de 1 niveau d’exposition professionnel pendant un mois de travail de 170 h.

[1] Note du traducteur: un autre terme couramment utilisé est : employeur.

 

Publication 136 de la CIPR: Coefficients de dose pour les biotes non-humains exposé aux rayonnements ionisants dans l'environment
Résumé

La diversité des biotes représente un défi spécifique pour le développement et l’application de modèles dosimétriques visant à évaluer l’exposition de la flore et de la faune aux sources radioactives présentes dans l’environnement. Les modèles dosimétriques adoptés dans la Publication 108 fournissent des coefficients de dose (DCs) pour un ensemble d’animaux et de plantes de référence (RAPs). Ces coefficients de dose sont utilisés pour évaluer les doses et les débits de dose afin de comparer ces derniers aux niveaux de référence dérivés (DCRLs). Ces niveaux correspondent à des gammes de débits de dose dans lesquelles des effets délétères sur un RAP particulier pourraient survenir en cas d’exposition chronique et prolongée aux rayonnements ionisants, comme décrit dans la Publication 124. Ces modèles dosimétriques reposent sur des hypothèses pragmatiques, à savoir une forme anatomique simple de composition et densité uniformes, une contamination interne homogène, un ensemble également simplifié et limité de sources d’exposition externe aux rayonnements ionisants pour les animaux et plantes aquatiques et terrestres, et la prise ne compte de chaînes de désintégration radioactive tronquées. Cette méthodologie pragmatique a été développée et étendue de manière systématique dans cette publication, qui remplace les valeurs de DC de la Publication 108. Les changements méthodologiques significatifs depuis la Publication 108 incluent : la mise en œuvre d’une nouvelle approche pour modéliser l’exposition externe des animaux terrestres avec un ensemble élargi de sources radioactives environnementales dans le sol et l’air ; la prise en compte d’un éventail élargi d’organismes et de localisation environnementale dans des terrains contaminés par des substances radioactives; la transition vers la base de données des radionucléides mise à jour dans la Publication 107 ; la prise en compte spécifique à l’évaluation dosimétrique conduite de la contribution des descendants radioactifs aux coefficients de dose des radionucléides parents ; l’utilisation de relations allométriques généralisées pour estimer les paramètres biocinétiques ou métaboliques. Ces développements méthodologiques entraînent des modifications des tableaux de coefficients de dose précédemment publiés pour les RAPs, dont les valeurs révisées sont fournies dans cette publication. En complément, un nouvel outil logiciel, appelé « BiotaDC », est introduit. Cet outil permet à l’utilisateur, de calculer les coefficients de dose pour les expositions internes et externes d’organismes en fonction de leur masse, de leur forme et de leur localisation dans l’environnement, et pour tous les radionucléides répertoriés dans la Publication 107.

Mots-clés: biote non humain ; protection radiologique de l’environnement ; coefficients de dose ; animaux et plantes de référence ; dosimétrie

 

Publication 138 de la CIPR: Les fondements éthiques du système de radioprotection
Résumé

Même s'il est reconnu depuis longtemps que la protection radiologique n'est pas seulement une question de science, mais aussi d’éthique, les publications de la CIPR ont rarement abordé explicitement la question des fondements éthiques du système de radioprotection. Le but de cette publication est de décrire la façon dont la Commission s'est appuyée sur des valeurs éthiques, intentionnellement ou indirectement, dans le développement du système de radioprotection et de présenter une approche structurée de la manière dont l’éthique fait partie du système. Ce faisant, il contribue à clarifier les jugements de valeur inhérents adoptés pour la réalisation des objectifs du système de protection radiologique tels que soulignés par la Commission dans la Publication 103. Bien que s'adressant principalement à la communauté de la radioprotection, cette publication s'adresse également aux autorités, aux opérateurs, aux travailleurs, les professionnels de la santé, les patients, le public et ses représentants (par exemple les ONG) agissant dans l’intérêt de la protection des personnes et de l’environnement. Cette publication présente les principales étapes concernant les évolutions scientifiques, éthiques et pratiques du système de protection radiologique depuis la première publication de la CIPR en 1928. Elle décrit ensuite les quatre valeurs éthiques fondamentales qui sous-tendent le système actuel : la bienfaisance/non-malfaisance, la prudence, la justice et la dignité. Elle explique également comment ces valeurs éthiques sont liées aux principes de la radioprotection, à savoir la justification, l’optimisation et la limitation. La publication aborde enfin les principales valeurs procédurales nécessaires à la mise en œuvre pratique du système, en se concentrant sur la responsabilité, la transparence et la participation et l’engagement des parties prenantes. La Commission voit cette publication comme un document fondateur qui devra être élaboré davantage dans différentes situations et circonstances.

Mots clés: Système de radioprotection ; Valeurs éthiques ; Valeurs procédurales

Points principaux
  • La protection radiologique repose sur des connaissances scientifiques, des considérations éthiques et l’expérience pratique.Cette publication de la CIPR est la première consacrée à l'élaboration des fondements éthiques du système de radioprotection.
  • Cette publication fournit les fondements et un langage commun pour la discussion sur les aspects éthiques de la radioprotection entre experts et avec un public plus large. Elle apporte également un regard des enjeux éthiques pour l'application du système de protection radiologique lorsqu’il existe une compétition entre les priorités.
  • Le système de radioprotection repose sur quatre valeurs éthiques fondamentales :
    • La bienfaisance/non-malfaisance : promouvoir ou faire le bien, et éviter de nuire.Cela se reflète, par exemple, dans l'objectif premier du système de protection radiologique : “un niveau de protection approprié… sans indûment limiter… les actions humaines souhaitables.”
    • La prudence : faire des choix éclairés et soigneusement réfléchis sans avoir la connaissance complète de la portée et des conséquences d'une action.La prudence se reflète, par exemple, dans la prise en compte de l'incertitude sur les risques radiologiques pour les humains et l'environnement.
    • La justice : équité dans la répartition des avantages et des inconvénients.La justice est une valeur clé qui sous-tend, par exemple, les restrictions sur les doses individuelles visant à prévenir tout individu d’être soumis à un risque excessif et inéquitable.
    • La dignité : le respect inconditionnel que mérite toute personne, quelle que soit ses caractéristiques et sa situation personnelle.L'autonomie personnelle est un corollaire de la dignité humaine.Cela sous-tend, par exemple, l’importance accordée à la participation des parties prenantes et l’autonomisation des individus pour qu’ils puissent prendre leurs propres décisions de façon éclairées.
  • Les valeurs éthiques fondamentales soutiennent les objectifs du système de protection radiologique et ses trois principes fondamentaux : la justification, l’optimisation et la limitation des doses individuelles.
  • Trois valeurs procédurales sont retenues pour faciliter la mise en œuvre pratique des mesures de protection radiologique : la responsabilité, la transparence et la participation et l’engagement des parties prenantes.
Synthèse

Bien qu'il soit reconnu depuis longtemps que la protection radiologique n'est pas seulement une affaire de science, mais repose également sur des considérations éthiques, les publications de la CIPR ont rarement abordé explicitement les fondements éthiques du système de protection radiologique. Cela ne signifie pas que la Commission ignore l'importance de ces considérations. Les recommandations en matière de protection représentent inévitablement une position éthique, qu'elle soit explicite ou implicite. C'est pourquoi on retrouve des considérations éthiques dans de nombreuses publications de la CIPR.

Cette publication passe en revue les publications précédentes de la Commission afin d'identifier les valeurs éthiques associées au système de protection radiologique de la CIPR pour les expositions professionnelles, celles du public, les expositions médicales et pour la protection de l'environnement. Elle décrit les éléments clés des théories et principes éthiques qui prévalent dans les domaines de la santé et de l'environnement et qui sont pertinents pour la protection radiologique.

Cette publication vise à souligner comment la Commission s'est appuyée sur des valeurs éthiques dans l'élaboration du système de radioprotection, avec l'objectif de présenter une vision cohérente de la manière dont l'éthique fait partie de ce système. L'éthique ne peut pas apporter de solutions définitives, mais elle peut contribuer à faciliter les discussions entre ceux qui cherchent à promouvoir le bien-être des individus, le développement durable et la protection de l'environnement. Une meilleure compréhension des valeurs éthiques fondamentales et de leur connexion avec les principes de la radioprotection aidera à résoudre les problèmes liés aux conflits potentiels dans la prise de décision.

L’un des objectifs de cette publication est de présenter ce que l'on peut raisonnablement attendre de la protection radiologique pour les individus et les sociétés. Ainsi, elle aide à clarifier les jugements de valeur inhérents à la réalisation de l'objectif du système de protection radiologique, comme l'a souligné la Commission dans sa publication 103, et facilite les processus de prise de décision et la communication sur les risques liés aux rayonnements.

Cette publication présente les étapes qui ont marqué l'évolution du système de protection radiologique depuis la première publication de la CIPR en 1928. Elle décrit ensuite les valeurs éthiques fondamentales qui fondent le système, et examine également comment ces valeurs éthiques fondamentales sous-tendent les principes de la radioprotection, à savoir la justification, l'optimisation et la limitation. Elle présente les principales valeurs procédurales qui sous-tendent les exigences relatives à la mise en œuvre pratique du système. Ensuite, elle présente les principales implications de l'éthique pour le système de protection radiologique. Les théories éthiques, les principes éthiques biomédicaux et les valeurs interculturelles pertinentes pour la radioprotection sont présentées dans les annexes de cette publication.

Le système actuel de protection radiologique repose sur trois piliers : la science de la radioprotection, qui combine des connaissances issues de différentes disciplines ; un ensemble de valeurs éthiques ; et l'expérience accumulée dans la pratique quotidienne de la radioprotection. Ces piliers sont illustrés dans la figure 2.1. Les lignes directrices explicites pour une prise en compte équilibrée de ces trois piliers dans la prise de décision ne sont pas souvent explicitées, apparemment parce qu'il n'y a pas de moyen direct et quantifiable de le faire : chaque pilier informe les autres, tout en ayant une influence sur le processus décisionnel. En outre, chaque situation d'exposition présente des caractéristiques ou des circonstances uniques qui doivent être prises en compte lors de la prise de décision. C'est pourquoi, au lieu d'une réponse fixe et universelle, des jugements de valeur sont nécessaires pour évaluer une situation ou une circonstance.

Publication 142: Figure 2.1

La bienfaisance consiste à promouvoir ou à faire le bien, et la non-malfaisance consiste à éviter de causer du tort (Frankena, 1963). Ces deux valeurs éthiques qui sont liées ont une longue histoire dans la philosophie morale, qui remonte au serment d'Hippocrate, qui exige d'un médecin qu'il fasse le bien et/ou qu'il ne nuise pas (Moody, 2011). Elles ont été formalisées dans l'éthique biomédicale moderne à la fin des années 1970, à la suite de la publication du "rapport Belmont" (DHEW, 1979) et des travaux précurseurs des philosophes Tom Beauchamp et Jim Childress (Beauchamp et Childress, 1979). La Commission n'a jamais utilisé les termes "bienfaisance" et "non-malfaisance" dans ses publications, mais ils sont essentiels au système de protection radiologique. Dans son sens le plus général, la bienfaisance inclut la non-malfaisance (Ross, 1930). En élaborant des recommandations visant à protéger les personnes contre les effets nocifs des rayonnements, la Commission contribue indubitablement à servir l'intérêt supérieur des individus et, indirectement, la qualité de la vie sociale. Cet objectif est atteint en pratique en veillant à ce que les effets déterministes soient évités et que les effets stochastiques soient réduits autant que possible compte tenu des circonstances. La non-malfaisance est étroitement liée à la prévention, qui vise à limiter les risques en éliminant ou en réduisant la probabilité des dangers, et donc à promouvoir le bien-être.

La prudence est la capacité de faire des choix éclairés et mûrement réfléchis sans avoir une connaissance parfaite de la portée et des conséquences de ses actes. C'est aussi la capacité de choisir et d'agir en fonction de ce qu'il est en notre pouvoir de faire et de ne pas faire. La prudence a une longue histoire dans l'éthique. Elle est considérée comme l'une des principales vertus enracinées dans la tradition occidentale et développée par Platon et Aristote, ainsi que dans l'enseignement de Confucius, des philosophies hindoues et bouddhistes et des anciennes traditions des peuples d'Eurasie, d'Océanie et d'Amérique du Nord. À l'origine, la prudence signifie "la sagesse pratique", ce qui est le sens du mot grec "phronesis". Elle décrit la qualité qui consiste à avoir les connaissances, l'expérience et le jugement nécessaires pour prendre des décisions raisonnables et agir en conséquence. Le système de protection radiologique repose sur des preuves scientifiques solides. Cependant, des incertitudes subsistent pour les effets à de faibles niveaux d'exposition, ce qui nécessite des jugements de valeur. La prise de décision exige que la prudence soit une valeur centrale. Cependant, la prudence ne doit pas être synonyme de conservatisme ou de ne jamais prendre de risques. Elle décrit la manière dont les décisions sont prises, et pas seulement le résultat de ces décisions.

La justice est généralement définie comme l'équité dans la distribution des avantages et des désavantages entre les groupes de personnes (justice distributive), l'équité dans la réparation des pertes (justice réparatrice) et l'équité des règles et des procédures dans les processus de prise de décision (justice procédurale). Alors que l'équité et l'iniquité se rapportent à la situation de la distribution des biens, l'équité ou la justesse peuvent également être utilisées pour décrire le degré d'équité atteint dans cette distribution. Il convient de souligner que la Commission n'a pas fait explicitement référence à la justice dans ses recommandations précédentes. Cependant, l'idée de limiter les expositions individuelles afin de corriger d'éventuelles disparités dans la distribution de ces expositions aux rayonnements parmi les populations exposées est apparue dès la publication 26 (ICRP, 1977). Dans la publication 60, le terme "inéquité" a été utilisé pour la première fois : “Lorsque les avantages et les inconvénients ne se répartissent pas de la même façon dans la population, il y a forcément une certaine iniquité. Une iniquité grave peut être évitée par l'attention portée à la protection des individus" (CIPR, 1991).

La dignité est un attribut de la condition humaine : l'idée que quelque chose est dû à une personne parce qu'elle est humaine. Cela signifie que chaque individu mérite un respect inconditionnel, quels que soient les caractéristiques personnelles ou les circonstances, tels que l'âge, le sexe, la santé, le handicap, la condition sociale, l'origine ethnique, la religion, etc. Cette idée occupe une place importante dans la Déclaration universelle des droits de l'homme, qui stipule que “Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits" (Nations unies, 1948). La dignité est depuis longtemps la valeur centrale de nombreuses théories éthiques, notamment pour Kant qui considère qu’il faut traiter les individus comme des sujets et non comme des objets : “Agissez de telle sorte que vous traitiez l'humanité, qu'il s'agisse de votre propre personne ou de la personne d'autrui, jamais comme un simple moyen de parvenir à vos fins" (Kant, 1785). L'autonomie personnelle est un corollaire de la dignité humaine. C'est l'idée que les individus ont la capacité d'agir librement (c'est-à-dire de prendre des décisions non contraintes et en connaissance de cause). Le respect de la dignité humaine a été promu pour la première fois dans le domaine de la radioprotection sous le terme de "consentement éclairé" dans la recherche biomédicale, ce qui signifie qu'une personne a "le droit d'accepter le risque volontairement" et "un droit égal de refuser d'accepter" (CIPR, 1992). Avec le concept de "droit de savoir", le "consentement éclairé" a été clairement établi dans la publication 84 sur la grossesse et les rayonnements médicaux (CIPR, 2000). Au-delà du domaine médical, la dignité humaine a été introduite explicitement comme "la nécessité de respecter les droits de l'homme et l'éventail des opinions humaines qui en découle" dans le rapport de la CIPR pour la protection de l'environnement (CIPR, 2003).

Les quatre valeurs éthiques fondamentales sont présentes dans le système actuel de protection radiologique, mais leur relation avec les trois principes de justification, d'optimisation et de limitation n'est pas évidente. Ce n’est pas tant le cas pour la justification, qui peut être comprise comme se référant principalement, mais pas exclusivement, à la bienfaisance/non-malfaisance, ou plutôt comme l'équilibre entre "faire le bien" et "éviter le mal". En revanche, pour le principe d'optimisation (c'est-à-dire de maintenir l'exposition au niveau le plus bas qu'il est raisonnablement possible, en tenant compte des facteurs économiques et sociétaux) et pour le principe de la limitation de la dose (c'est-à-dire maintenir le risque à un niveau tolérable), plusieurs valeurs éthiques fondamentales sont à prendre en considération.

Pour la mise en œuvre pratique de ses recommandations, la Commission retient un certain nombre d'exigences relatives aux aspects procéduraux et organisationnels de la radioprotection. Trois de ces exigences méritent d'être soulignées, étant communes à toutes les situations d'exposition : la responsabilité, la transparence et la participation et l’engagement des parties prenantes. Ces exigences comportent des aspects éthiques importants et sont interdépendantes.

La responsabilité peut être définie comme la valeur éthique procédurale selon laquelle les personnes en charge de la prise de décision doivent répondre de leurs actes devant toutes les personnes qui sont susceptibles d'être affectés par ces actes. En termes de gouvernance, cela signifie l'obligation pour les individus ou les organisations de rendre compte de leurs activités, d'en assumer la responsabilité, et d'être prêts à en assumer les conséquences si nécessaire.

La transparence fait également partie de la mise en œuvre de la valeur de la justice procédurale. Elle concerne l'équité du processus par lequel les informations sont partagées intentionnellement entre des individus et/ou des organisations. Selon l'Organisation internationale de normalisation (ISO), la transparence signifie "l'ouverture sur les décisions et les activités qui affectent la société, l'économie et l'environnement, et la volonté de les communiquer de manière claire, précise, opportune, honnête et complète" (ISO, 2010). La transparence n'est pas seulement synonyme de communication ou de consultation. Elle se rapporte à l'accessibilité des informations sur les activités, les délibérations et les décisions en jeu, ainsi que la clarté, la praticité et l'honnêteté avec lesquelles ces informations sont transmises.

La valeur de la participation et l’engagement des parties prenantes correspond à la manière dont elle est appliquée dans la pratique. La participation des parties prenantes, également appelée "implication des parties prenantes" ou "engagement des parties prenantes", signifie "l'implication de toutes les parties concernées dans les processus de prise de décision liés à la radioprotection" (IRPA, 2008). Au cours des dernières décennies, la participation des parties prenantes est devenue un élément essentiel du cadre éthique dans les organisations privées et publiques.

 

Publication 142 de la CIPR: Protection radiologique pour les processus industriels impliquant des materiaux radioactifs d’origine naturelle
Résumé

L'objet de cette publication est de fournir des conseils sur la radioprotection dans les industries impliquant des matériaux radioactifs d’origine naturelle (NORM). Ces industries peuvent donner lieu à de multiples risques et le risque radiologique n'est pas nécessairement dominant. Ces industries sont diverses et peuvent impliquer une exposition des personnes et de l'environnement pour lesquelles des actions de protection doivent être prises en considération. Dans certains cas, il existe un risque potentiel d’exposition chronique importante des travailleurs et des membres du public si des actions de protection appropriées ne sont pas envisagées. Les rejets de volumes importants de matériaux radioactifs d’origine naturelle peuvent également entraîner des effets néfastes sur l'environnement du fait de leurs constituants radiologiques et non radiologiques. Cependant, les industries NORM ne présentent pas de réelle perspective de provoquer une situation d’urgence radiologique entraînant des réactions tissulaires ou un danger immédiat pour la vie. La radioprotection dans les industries impliquant des NORM peut être traitée de manière appropriée sur la base du principe de justification des actions entreprises et du principe d'optimisation de la protection à l'aide de niveaux de référence. Une approche intégrée et graduée est recommandée pour la protection des travailleurs, du public et de l'environnement, dans laquelle les risques non radiologiques sont pris en compte en intégration avec les risques radiologiques, et l'approche de protection est optimisée (graduée) de sorte que l'utilisation des divers éléments du programme de protection radiologique soit en adéquation avec les risques, sans imposer de contraintes inutiles. Pour les travailleurs, l'approche commence par la caractérisation de la situation d'exposition et l'intégration, si nécessaire, de actions de protection radiologique spécifiques pour compléter la stratégie de protection déjà en place ou prévue pour gérer d'autres risques sur le lieu de travail. Selon les caractéristiques de la situation d'exposition et l'ampleur des risques, un niveau de référence pertinent devrait être sélectionné et des actions de protection collectives ou individuelles appropriées devraient être prises. L'exposition au radon est également traitée à l'aide d'une approche graduée, basée d'abord sur l'application de techniques typiques de prévention et de remédiation du radon, comme décrit dans la Publication 126. Une approche similaire devrait être mise en œuvre pour l'exposition du public par le biais du contrôle des rejets, des déchets et des résidus après caractérisation de la situation. Si la protection des espèces non humaines est justifiée, elle devrait être assurée après une évaluation de l'exposition radiologique adaptée aux circonstances, en tenant compte de tous les dangers et impacts. Cette évaluation doit comprendre l'identification des organismes exposés dans l'environnement et l'utilisation de niveaux de référence pertinents dérivés pour la protection radiologique environnementale pour éclairer les décisions sur les options de maîtrise de l'exposition.

Mots clés: Protection radiologique ; Matériaux radioactifs d’origine naturelle (NORM) ; Optimisation ; Approche intégrée ; Approche graduée

Points principaux
  • Les expositions résultant d'activités industrielles impliquant des matériaux radioactifs d’origine naturelle (NORM) sont maîtrisables, la protection étant assurée par la justification des actions de protection et l'optimisation de la protection.
  • Les NORM ne présentent pas de réelle perspective de provoquer une situation d'urgence radiologique entraînant des réactions tissulaires ou un danger immédiat pour la vie ;les actions de protection des travailleurs et du public devraient prendre en compte l'exposition externe à long terme, l'absorption de matières radioactives et l'inhalation de radon ou de thoron.
  • Une approche intégrée et graduée est recommandée pour la protection des travailleurs, du public et de l'environnement, comprenant la caractérisation de la situation d'exposition et l'optimisation des actions de protection radiologique pour compléter la stratégie de protection déjà en place ou prévue pour gérer d'autres risques.
  • Les niveaux de référence (à l'exclusion de l'exposition au radon et au thoron) pour la protection des travailleurs devraient refléter la distribution des expositions et seraient, dans la majorité des cas, inférieurs à quelques mSv de dose efficace annuelle.Il est très rare qu'une valeur supérieure à 10 mSv de dose efficace annuelle soit nécessaire.
  • Les niveaux de référence pour la protection du public devraient refléter la répartition des expositions et seraient généralement inférieurs à quelques mSv de dose efficace annuelle.
  • Les expositions au radon et au thoron devraient être gérées selon une approche graduée, en s'appuyant d'abord sur des actions de prévention et de remédiation du radon dans le bâtiment, comme recommandé dans la Publication 126 (ICRP, 2014b).
Conclusions

(142) Les matériaux radioactifs d’origine naturelle (NORM) dans les procédés industriels peuvent constituer un enjeu du point de vue de la radioprotection. Les industries sont diverses, ne constituent pas un secteur en elles-mêmes et sont souvent de grandes industries d'importance économique. La manière d'aborder la radioprotection dans les industries impliquant des NORM fait l'objet de discussions depuis des décennies. C'est une question de justice et d'équité, qui sont des valeurs éthiques du système de radioprotection, de prendre en compte les aspects radiologiques ainsi que d'autres risques industriels et chimiques. Les doses induites par les industries impliquant des NORM sont variables, mais elles peuvent être comparables, voire supérieures, à celles provenant d'autres activités humaines appliquant déjà le système de radioprotection. Cependant, dans les industries impliquant des NORM, il est très peu probable que les doses atteignent un niveau conduisant à une réaction tissulaire. 

(143) Les industries qui utilisent des matériaux radioactifs d’origine naturelle sont généralement soumises à autorisation, bien que, dans de nombreux cas, ce ne soit pas à des fins de radioprotection, et il est fréquent que la gestion des risques dans ces industries pour la protection des travailleurs, du public et de l'environnement soit encadrée Elles devraient généralement être en mesure d'appliquer les critères et exigences fixés à des fins de radioprotection. L'expérience montre qu‘il est plus facile de développer une approche multirisque à partir des normes de santé et de sécurité conventionnelles plutôt qu’à partir du système de radioprotection. Dans ce contexte, la Commission recommande une attitude réaliste et pragmatique.

(144) Les procédés industriels utilisant des matériaux radioactifs d’origine naturelle, bien que divers, présentent des spécificités qui doivent être prises en compte dans une stratégie de protection. Souvent, de telles industries sont anciennes alors que la préoccupation en matière de protection radiologique est relativement récente. Il s'agit de situations à risques multiples et, dans la plupart des cas, le risque radiologique n'est pas dominant. Si les industries utilisant des matériaux radioactifs d’origine naturelle ont de l'expérience en matière de gestion des risques, elles ont souvent une connaissance limitée de la protection radiologique ; celle-ci peut et devrait être développée.

(145) Les industries impliquant des matériaux radioactifs d’origine naturelle peuvent nécessiter d’être soumises à contrôle et le système de protection radiologique, incluant les principes de justification et d'optimisation de la protection, ainsi que les critères dosimétriques et les exigences correspondants, peut être appliqué. Pour une adaptation aux caractéristiques des industries impliquant des matériaux radioactifs d’origine naturelle, la Commission recommande de considérer, comme point de départ, les stratégies de protection déjà mises en œuvre par ces industries pour gérer les risques auxquels elles sont confrontées, puis d'estimer, après caractérisation, la nécessité d’actions supplémentaires pour la protection contre les rayonnements ionisants. Une telle approche intégrée peut être graduée en équilibrant correctement les différents risques, en adoptant une attitude raisonnable et prudente et en tenant compte des considérations économiques et sociétales. La participation des parties prenantes concernées au processus de décision est essentielle.

Justification et optimisation

P142 Justification et optimisation

 

Publication 146 de la CIPR: Protection radiologique des personnes et de l’environnement en cas d’accident nucleaire majeur
Résumé

Cette publication fournit un cadre pour la protection des personnes et de l’environnement lors d’un accident nucléaire majeur, en s’appuyant sur l’expérience des accidents de Tchernobyl et de Fukushima. Dans la gestion des accidents, la Commission distingue les phases d’urgence et intermédiaire, considérées comme des situations d’exposition d’urgence, et la phase de long terme, considérée comme une situation d’exposition existante. Dans les situations d’exposition d’urgence et d’exposition existante, la réduction des conséquences radiologiques sur l’homme et l’environnement est réalisée en s’appuyant sur les principes fondamentaux de justification des décisions et d’optimisation de la protection. La Commission recommande un ensemble de niveaux de référence pour l’optimisation de la protection de la population générale et des intervenants, sur site et hors site, pour toutes les phases de l’accident. La mise en œuvre d’actions de protection ne devrait pas tenir compte uniquement des facteurs radiologiques mais devrait aborder également les aspects sociétaux, environnementaux et économiques visant à protéger la santé, garantir des conditions de vie durables à la population affectée, assurer de bonnes conditions de travail aux intervenants et maintenir la qualité de l’environnement. Lors de la phase d’urgence d’un accident, des actions de protection immédiates doivent être prises, tout en disposant souvent de peu d’informations. Les décisions reposent sur des actions identifiées lors de la phase de préparation qui semblent le mieux adaptées à la situation réelle. Durant la phase intermédiaire, les actions de protection réduisent progressivement les expositions aux rayonnements. Lorsque la situation radiologique est suffisamment caractérisée, la phase de long terme débute, et d’autres actions de protection sont alors mises en œuvre pour améliorer les conditions de vie et de travail. Il convient que les autorités invitent les principales parties prenantes représentatives à participer au processus de préparation et à la gestion les différentes phases de l’accident. Il appartient aux autorités de mettre en œuvre la surveillance radiologique et sanitaire et de fournir les conditions et les moyens de partage des informations et des expertises pour permettre aux personnes de développer une culture de radioprotection et de faire des choix éclairés pour leur propre protection.

Mots-clés: accident de Tchernobyl ; accident de Fukushima ; situation d’exposition d’urgence ; situation d’exposition existante ; justification ; optimisation ; niveau de référence ; actions de protection ; implication des parties prenantes ; processus de co-expertise ; culture de radioprotection

Points principaux

• Un accident nucléaire majeur provoque une rupture dans la société qui affecte tous les aspects de la vie des personnes et des communautés. Il a des conséquences sociétales, environnementales et économiques importantes et durables.
• La caractérisation de la situation radiologique, sur site et hors site, est essentielle pour orienter les actions de protection et il convient de la mener dans les plus brefs délais.
• La Commission recommande d’utiliser des niveaux de référence pour guider la mise en œuvre des actions de protection pendant les phases d’urgence, intermédiaire et de long terme d’un accident.
• L’objectif de la radioprotection est d’atténuer les conséquences radiologiques pour les personnes et sur l’environnement tout en garantissant des conditions de vie durables pour les personnes affectées, des conditions de travail adaptées pour les intervenants et le maintien de la qualité de l’environnement.
• Il convient que les intervenants, personnes a priori les plus exposées, bénéficient d’une protection appropriée, en tenant compte des exigences de l’intervention sur site et hors site.
• Il convient que les organisations responsables encouragent les communautés locales à coopérer avec des experts (processus de co-expertise) pour que les personnes affectées puissent mieux appréhender la situation locale, élaborer une culture pratique de radioprotection appropriée et faire des choix éclairés.
• La préparation est essentielle pour atténuer les conséquences durant les phases d’un accident nucléaire majeur et il convient d’impliquer les parties prenantes.

Synthèse
  1. Les accidents nucléaires majeurs se traduisent par le rejet de quantités importantes de matières radioactives dans l’environnement qui peuvent impacter un vaste territoire et une population importante. Ce sont des événements imprévus qui affectent profondément les personnes, la société et l’environnement. Ils génèrent des situations complexes et des préoccupations légitimes, en particulier en matière de santé des personnes affectées par la présence de sources de radioactivité indésirables. La gestion de cette situation nécessite la mobilisation à long terme de ressources humaines et financières considérables. La radioprotection, bien qu’indispensable, n’est qu’une composante parmi les moyens qui doivent être mobilisés pour faire face aux enjeux auxquels les personnes et les organisations affectées sont confrontées.
  2. Pour gérer de tels événements, la Commission distingue les phases d’urgence et intermédiaire, considérées comme des situations d’exposition d’urgence, et la phase de long terme, considérée comme une situation d’exposition existante. La Commission fait aussi la distinction entre sur site et hors site pour différencier respectivement les activités dans l’installation endommagée et celles dans les territoires affectés. Les présentes recommandations peuvent s’appliquer à d’autres types d’urgences radiologiques, en veillant à bien tenir compte des différences qui existent inévitablement entre un accident nucléaire et ces urgences.
  3. La caractérisation de la situation radiologique sur site et hors site est essentielle pour pouvoir orienter correctement les actions de protection. Il convient de la mener dans les plus brefs délais pour lever les incertitudes relatives à l’intensité, la durée et l’étendue de la contamination radioactive.
  4. Dans les situations d’expositions d’urgence et existante, les objectifs de la radioprotection sont atteints en utilisant les principes fondamentaux de justification et d’optimisation. Le principe de justification garantit que les choix pris en matière d’actions de protection apportent un bénéfice pour les personnes affectées et l’environnement, car ces actions peuvent entraîner de sérieux préjudices. Le principe d’optimisation de la protection appliqué avec des niveaux de référence vise à limiter l’iniquité dans la répartition des expositions individuelles et à maintenir ou à réduire toutes les expositions à un niveau aussi bas que raisonnablement possible, compte tenu des facteurs sociétaux, environnementaux et économiques.
  5. Les principes de justification et d’optimisation sont appliqués pour réduire les conséquences radiologiques sur les personnes et l’environnement pendant toutes les phases de l’accident et devraient dûment tenir compte de tous les facteurs non radiologiques afin de préserver ou de rétablir les conditions de vie et de travail de toutes les personnes affectées, y compris leur garantir un mode de vie et des moyens de subsistance décents.
  6. Les personnes impliquées dans la gestion directe des conséquences d’un accident nucléaire sont multiples en termes d’expérience, de statut, de préparation et de formation à la radioprotection. Il peut s’agir d’équipes de secours (pompier, policier, personnel médical, etc.), de travailleurs (exposés professionnellement ou non) ou d’autres personnes comme des élus ou des citoyens volontaires. Toutes ces catégories sont considérées par la Commission comme des « intervenants ». Ils méritent d’être protégés de manière adéquate et de bénéficier de conditions de travail appropriées.
  7. En matière de protection des intervenants sur le site, il convient généralement que le niveau de référence pendant la phase d’urgence ne dépasse pas 100 mSv, même si, dans des circonstances exceptionnelles, des niveaux plus élevés, de l’ordre de quelques centaines de millisieverts, peuvent être admis lorsqu’il s’agit de sauver des vies ou pour empêcher une plus forte dégradation de l’installation pouvant conduire à des conditions catastrophiques. Des niveaux de référence inférieurs peuvent être fixés en fonction de la situation, selon la gravité de l’accident. Pendant la phase intermédiaire, il conviendrait que le niveau de référence n’excède pas 100 mSv. Pour la phase de long terme, il ne devrait pas dépasser 20 mSv par an, avec, le cas échéant, des aménagements possibles limités dans le temps. La Commission recommande que les organisations responsables mettent en œuvre toutes les actions pratiques pour éviter une surenchère inutile d’expositions des intervenants engagés dans les phases d’urgence et intermédiaire.
  8. Pour ce qui concerne la protection des intervenants hors site, la Commission recommande un niveau de référence inférieur à 100 mSv pour la phase d’urgence et inférieur à 20 mSv par an pour la phase intermédiaire. Pour la phase de long terme, le niveau de référence devrait être choisi dans la moitié inférieure de l’intervalle recommandé allant de 1 à 20 mSv par an.
  9. Pour la protection des personnes, le niveau de référence devrait généralement rester inférieur à 100 mSv pendant toute la durée des phases d’urgence et intermédiaire. La Commission recommande aux organisations responsables d’adopter un niveau de référence inférieur chaque fois que cela est possible. Pour la phase de long terme, il convient de maintenir le niveau de référence dans la moitié inférieure de l’intervalle recommandé pour les situations d’exposition existante allant de 1 à 20 mSv par an, en tenant compte de la distribution réelle des doses dans la population et des facteurs sociétaux, environnementaux et économiques ayant une influence sur la situation d’exposition. L’objectif de l’optimisation de la protection est de réduire progressivement l’exposition à des niveaux se situant dans la moitié inférieure de l’intervalle ou, si possible, en dessous.
  10. Dans certains scénarios d’accident nucléaire, le rejet d’iode radioactif peut entraîner une forte exposition de la thyroïde par inhalation ou par ingestion. Il convient de tout faire pour éviter, ou du moins réduire, l’absorption d’iode radioactif, en particulier chez les enfants et les femmes enceintes. Pendant la phase d’urgence ou juste après, les populations exposées devraient être surveillées pour détecter toute exposition potentielle à l’iode radioactif.
  11. La gestion de la protection des populations dans les territoires affectés durant les phases intermédiaire et de long terme est un processus complexe qui implique des considérations radiologiques, sociétales, environnementales et économiques. Ce processus comprend des actions mises en œuvre par les autorités nationales et locales, et des actions d’autoprotection prises par les habitants des territoires affectés. Durant ces phases, les expositions aux rayonnements des populations vivant et travaillant dans ces territoires dépendent principalement du mode de vie de chacun. La Commission recommande aux autorités, aux experts et aux parties prenantes de coopérer dans le cadre du processus dit de « co-expertise » afin de partager les expériences et les informations, d’encourager la participation des communautés locales et de développer une culture pratique de radioprotection pour permettre aux populations de prendre des décisions éclairées. Des mesures individuelles de la radioactivité réalisées avec des appareils adéquats, accompagnées d’informations pertinentes, sont très utiles pour la mise en œuvre de ce processus.
  12. En matière de protection de l’environnement, la Commission recommande de protéger la faune et la flore en utilisant son approche fondée sur la notion d’animaux et de plantes de référence et les niveaux de référence dérivés « bien pesés » (Derived consideration reference levels ou DCRL). Il convient également de prendre en compte les impacts des actions de protection sur les animaux de compagnie et le cheptel, ainsi que sur l’environnement, en termes de développement durable, de conservation, de préservation et de maintien de la biodiversité.
  13. La Commission recommande que des plans soient préparés pour éviter des conséquences graves et à long terme d’un accident nucléaire. Ces plans devraient comprendre un ensemble d’actions de protection cohérentes, adaptées aux conditions locales des sites nucléaires, en tenant compte des facteurs sociétaux, environnementaux et économiques qui auront une incidence sur l’impact de l’accident et sur sa réponse.